Volume 76, no 42 le 19 novembre 2012
SETH GALINSKY
Des gardiens de sécurité privés ont tué deux travailleurs en grève à une mine de la Forbes & Manhattan Coal Corporation le 31 octobre dans la province du KwaZulu-Natal en Afrique du Sud. Quelque 900 travailleurs sont en grève dans deux mines souterraines et une usine de traitement de la société canadienne depuis le 17 octobre.
Les mineurs de charbon sont parmi les dizaines de milliers de mineurs qui ont fait grève pour des augmentations de salaire et d’autres revendications dans l’industrie du platine, de l’or et du chrome du pays.
Les deux grévistes tués, Alfred Mzikayifani Mdiyako, âgé de 58 ans, et Sanele Mthethwa, 39 ans, faisaient du piquetage avec d’autres grévistes à l’entrée de la mine quand la police leur a dit de se déplacer. Ils ont obtempéré et ont continué le piquetage un peu plus loin.
« Nous avons vu l’un des directeurs de la mine charger des gardiens de Mbube Security à l’arrière de sa camionnette à la porte de la mine et se diriger vers nous, » a déclaré le fils d’Alfred Mzikayifani Mdiyako, Sphamandla Mncube, lui aussi un mineur en grève, au journal Witness. « Les gardiens de sécurité ont sauté de la camionnette et ont foncé sur nous en tirant des coups de feu. »
Les gardiens n’ont pas été arrêtés ou mis en accusation pour ces meurtres.
Les mineurs en grève et leurs partisans ont manifesté à Dundee le 2 novembre pour exiger l’arrestation et l’engagement de poursuites contre les gardiens de sécurité et pour faire valoir leurs revendications pour une augmentation de salaire.
« La police est censée protéger tout le monde, » a déclaré au Militant par téléphone Zet Luzipo, secrétaire régional du Congrès des syndicats sud-africains, juste après la manifestation. « Au lieu de cela, la police est utilisée comme une armée privée pour les propriétaires des mines. »
« Pourquoi n’y a-t-il aucune arrestation ? » a déclaré Bhekani Ngcobo, coordinateur régional du Syndicat national des mineurs (NUM), dans un entretien téléphonique le lendemain. « Si c’était des travailleurs qui étaient accusés d’un meurtre, nous aurions été arrêtés et n’aurions pas été libérés avant qu’il y ait une enquête. »
Interrogé sur les assassinats, le porte-parole de Forbes, James Duncan, a dit qu’il ne pouvait pas faire de commentaire, parce que « l’enquête criminelle doit suivre son cours. »
Contrairement aux grèves centrées dans la province du Nord-Ouest de 50 000 mineurs d’or qui ont récemment pris fin et à une grève de plus de 26 000 mineurs à Anglo American Platinum (Amplats) qui continue, la grève à Forbes Coal est une grève « protégée ». En vertu de la loi sud-africaine, les grèves sont considérées comme protégées si les travailleurs ont reçu un certificat de grève après avoir demandé la médiation et annoncé 48 heures à l’avance leur intention de faire grève.
Les syndicats s’unissent à la mine de charbon
Les grèves « non protégées » ont été organisées en grande partie par des comités de grève choisis par les mineurs, sans la participation ou le soutien des responsables du NUM, un allié du gouvernement, ou du Syndicat de l’association des mineurs et de la construction (AMCU), souvent décrit dans la presse sud-africaine comme une scission du NUM. Mais dans cette grève, les responsables du NUM et de l’AMCU, ainsi que des représentants de travailleurs qui n’appartiennent à aucun des deux syndicats, travaillent ensemble pour coordonner leur combat pour des hausses de salaire et de meilleures conditions de travail.« Nous sommes aux antipodes, a déclaré James Duncan, porte-parole de la société. Les employés réclament une augmentation de salaire de 100 pour cent. La compagnie a proposé 6 pour cent. La position de l’entreprise est que 100 pour cent est tout simplement hors de nos moyens quand le marché du charbon est extrêmement faible. »
Interrogé sur le salaire des mineurs, James Duncan a répondu: « Je ne vais pas entrer là-dedans avec vous. Vous donner des chiffres dans le contexte sud-africain peut être extrêmement trompeur. »
Les responsables syndicaux disent que les travailleurs gagnent entre 3 400 à 4 200 rands par mois (400 $ à 480 $ US), des salaires parmi les plus bas de l’industrie minière.
« Je veux plus d’argent parce que nous travaillons très dur, » a déclaré par téléphone Baboangile Ndebele, 36 ans, une ouvrière au boulonnage du toit et l’une des nombreuses femmes qui travaillent au fond. « Le salaire est très bas. Il fait noir au fond. Il y a beaucoup de produits chimiques et de poussière. »
« Forbes remplit 300 wagons de charbon par jour, » a expliqué au Militant Warton Mdaduli, un organisateur de l’AMCU, en réponse aux affirmations de Forbes qu’ils ne peuvent pas se permettre une augmentation de salaire substantielle.
« L’AMCU, le NUM, nous avons appelé à la grève ensemble, a déclaré Warton Mdaduli, même les non syndiqués ont voté pour la grève et nous sommes toujours unis. »
Les grévistes n’exigent pas seulement des salaires plus élevés, selon Warton Mdaduli. « Nous demandons également que les congés de maternité payés passent de quatre à six mois. Nous ne retournerons pas avant d’avoir obtenu satisfaction. »
Grève d’occupation à AngloGold
Pendant ce temps, les mineurs de la société AngloGold Ashanti ont organisé plusieurs débrayages d’occupation souterrains depuis leur retour au travail le 25 octobre, après que la compagnie a donné son accord pour faire passer les travailleurs à un grade de salaire supérieur et de payer une prime de 1 500 rands.« Nous avons commencé à entendre des rumeurs selon lesquelles les 1 500 rands seraient payés seulement à trois conditions : que nous produisions une certaine quantité d’or, qu’il n’y ait aucun accident mortel et qu’il n’y ait pas de nouveaux débrayages, le tout avant le 16 novembre, » a dit au Militant Tshepo Motloi, un mineur à AngloGold.
Après que les travailleurs des puits de mine Mponeng et TauTona ont déclenché des grèves d’occupation souterraines le 31 octobre et le 2 novembre, l’entreprise a accepté d’avancer le versement de la prime au 6 novembre au plus tard.
« Il s’agissait d’un désaccord concernant le moment pour accorder une prime de sécurité », a déclaré par téléphone Alan Fine, porte-parole de AngloGold. « Elle est liée aux résultats de sécurité, au présentéisme et oui, à l’augmentation de la production. »
Le 5 novembre, les travailleurs ont organisé un autre débrayage souterrain de courte durée au puits de mine Mponeng, exigeant le paiement immédiat de la prime et que les accusations d’incitation à la violence portées contre le mineur Rodgers Motlhabane, un dirigeant de la grève, soient abandonnées. Alan Fine a soutenu qu’« il y a eu du vandalisme et un comportement menaçant. » Même si l’occupation a pris fin, Alan Fine a déclaré qu’AngloGold ne redémarrera pas le travail au puits « avant que nous n’ayons reçu l’assurance que les choses reviendront à la normale. »
Tshepo Motloi a expliqué que personne n’avait été menacé. « Il y avait 2 700 travailleurs au fond et seulement une quinzaine de responsables de l’entreprise. Les travailleurs leur ont dit de ne pas bouger pendant l’action », a-t-il noté, et personne n’a été blessé.
« La société veut que nous restions tranquilles face à l’injustice, a déclaré Tshepo Motloi. Mais nous allons mettre nos uniformes demain et nous présenter au travail même s’ils disent qu’ils ne nous laisseront pas travailler. »
Front page (for this issue) |
Home |
Text-version home