Année 81, no 39 le 23 octobre 2017
Tous trois combattent les accusations. Ils sont menacés de prison à perpétuité.
Quelque 50 personnes ont assisté au premier jour du procès, dont plusieurs militants de la Coalition des citoyens et organismes engagés pour la sécurité ferroviaire à Lac-Mégantic, et d’autres qui sont venus manifester leur soutien aux travailleurs du rail.
« Pourquoi est-ce qu’Edward Burkhardt, le PDG de la MMA, n’est pas à la cour ? » s’enquiert le porte-parole de la coalition de Lac-Mégantic Robert Bellefleur. « Et Transports Canada, qui a donné à la MMA la permission spéciale d’opérer ses trains avec un équipage d’une seule personne, Tom Harding ? »
« Je ne veux pas de réponses de la part des trois hommes qui sont accusés, » a dit Jean Paradis aux médias. Les dirigeants de la Montreal, Maine and Atlantic sont « aux États-[Unis]. Transports Canada a laissé ces compagnies avares opérer des chemins de fer pour moins d’argent, dans le but de faire plus de profit plutôt que d’agir pour la sécurité des gens. La sécurité devrait venir en premier, pas en troisième. »
Jean Paradis a sauvé sa vie de justesse alors que l’immense boule de feu due à l’explosion de cette nuit-là avalait le Musi-Café où la majorité de ceux qui ont été tués ont été incinérés, dont trois de ses amis proches.
« Les trois accusés sont des victimes du système. Ce sont les derniers au bout de la ligne qu’on vise tout le temps, » a soutenu Richard Custeau au Journal de Montréal, expliquant ses espoirs qu’un jour ceux en haut de la hiérarchie de l’industrie du rail soient punis. Réal, le frère de Richard Custeau, est mort au Musi-Café.
« La MMA était un chemin de fer acheté à rabais par les investisseurs, dans le but d’augmenter ses profits puis de la vendre, » a expliqué l’avocat de Harding, Thomas Walsh, à une foule de journalistes entassés dans le hall à la pause-repas. « Aujourd’hui, la plupart des mêmes personnes dirigent son remplacement. Seul le nom a changé. Ils engrangent des profits au prix de la sécurité. Transports Canada a détourné le regard. »
Beaucoup de gens à Lac-Mégantic considèrent Tom Harding comme un héros. La nuit du désastre, il a stationné le train sur la voie principale dans une pente au village de Nantes, à environ 11 km de Lac-Mégantic. Il a laissé le moteur principal en marche pour alimenter les freins à air de la locomotive, a actionné les freins à bras sur sept wagons-citernes et a pris un taxi vers un hôtel de Lac-Mégantic pour se reposer la nuit, comme il l’avait fait plusieurs fois auparavant. Alors qu’il dormait, un petit feu s’est allumé dans le moteur principal en raison des coupures dans l’entretien par la Montreal, Maine and Atlantic.
Lorsque les pompiers sont arrivés pour éteindre le feu, ils ont éteint la locomotive et, sans le savoir, ont ainsi relâché les freins à air comprimé. Tom Harding a reçu un appel l’informant du feu et a proposé d’aller voir le train pour s’assurer que tout était en ordre. On lui a dit que toutes les mesures avaient été prises et qu’il pouvait retourner se coucher. Quelques instants plus tard le train a commencé à rouler vers la ville.
Réveillé par l’explosion, Tom Harding s’est précipité sur place et a risqué sa vie en aidant les pompiers à détacher et déplacer un certain nombre de wagons-citernes qui n’avaient pas explosé pour éviter une catastrophe encore plus grande.
Tom Harding, cible principale
L’accusation a dit que Tom Harding est coupable de négligence criminelle, parce qu’il n’a pas activé un nombre suffisant de freins à main et qu’il n’est pas allé vérifier le train après l’incendie.« Harding n’a pas pris la décision de garer le train sur une pente avec le moteur en marche. C’était la politique de l’entreprise, » a dit Walsh aux journalistes. « Tout se résume à des économies faites au détriment de la sécurité. Cette tragédie devait finir par arriver. »
Le Globe and Mail de Toronto a signalé dans un article d’investigation de mars 2016 que si le système automatique auxiliaire des freins à air comprimé avait été utilisé sur les wagons-citernes, le train n’aurait pas roulé du tout. Mais la politique de l’entreprise interdisait à Tom Harding d’utiliser le système parce qu’il en aurait coûter du temps, c’est-à-dire de l’argent, pour recharger le système en air avant que le train puisse partir le lendemain matin.
Le procès est le moyen que les dirigeants utilisent pour faire d’Harding un bouc émissaire responsable de la catastrophe plutôt que les patrons du rail et le gouvernement du Canada.
« Tom Harding et les autres ne devraient pas être devant la cour aujourd’hui, » a dit au Militant Chris Yeandel, mécanicien de locomotive et président de griefs, section locale 689, Conférence ferroviaire des Teamsters Canada. « Pourquoi les fonctionnaires de la MMA et de Transports Canada ne sont-ils pas dans le box ? Si Harding et les autres sont reconnus coupables, d’autres cheminots feront face à des accusations de négligence criminelle dans les prochaines tragédies provoquées par les politiques axées sur les profits des compagnies de chemin de fer. »
Le procès devrait durer au moins deux mois.
Les messages de soutien à Harding et Labrie doivent être envoyés au Syndicat des Métallos, section locale 1976, 2360 De Lasalle, bureau 202, Montréal, QC H1V 2L1. Les copies doivent être envoyées à Thomas Walsh, 165, rue Wellington N., bureau 310, Sherbrooke, QC, Canada J1H 5B9. Courriel : thomaspwalsh@hotmail.com.
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