Ligue communiste au Canada : « Il faut rompre avec les partis des patrons »

John Steele
le 19 mai 2025
Le 1er mai à Montréal, Philippe Tessier, deuxième à droite, cheminot et candidat de la Ligue communiste, parle avec des travailleurs de cimenterie en lock-out. « Nous devons défendre nos intérêts de classe » a-t-il dit.
Militant/John SteeleLe 1er mai à Montréal, Philippe Tessier, deuxième à droite, cheminot et candidat de la Ligue communiste, parle avec des travailleurs de cimenterie en lock-out. « Nous devons défendre nos intérêts de classe » a-t-il dit.

MONTRÉAL – « Quand Mark Carney, qui est devenu en mars le nouveau premier ministre libéral du Canada après la démission de Justin Trudeau, a déclenché les élections fédérales du 28 avril, deux voies opposées s’offraient aux syndicats », a dit au Militant Philippe Tessier, candidat de la Ligue communiste dans la circonscription montréalaise de Bourassa au lendemain de l’élection.

Tessier travaille comme chef de train pour le Canadien national et est membre du syndicat des Teamsters. Sa colistière dans la circonscription montréalaise de Dorval-Lachine-LaSalle était Katy LeRougetel, travailleuse syndiquée dans une boulangerie industrielle.

La première voie, c’était de refuser de soutenir les partis capitalistes et leurs campagnes anti-américaines de « Canada d’abord » et « Équipe Canada » et de lutter pour défendre le droit de grève et la résidence permanente pour tous les immigrants, un cours essentiel pour unifier les travailleurs contre les patrons et leurs gouvernements.

« Mais de nombreux responsables syndicaux ont choisi la voie opposée, a dit Tessier, celle du soutien à Mark Carney et aux libéraux. Dans une campagne d’unité nationale opposant les travailleurs canadiens aux travailleurs américains, ils ont lié les principaux syndicats aux mêmes forces de la classe dirigeante qui ont dirigé les attaques contre les libertés politiques et le droit de grève. »

Une majorité des dirigeants capitalistes du Canada ont soutenu Carney, l’ancien gouverneur de la Banque du Canada et de la Banque d’Angleterre. Ils se sont servi des batailles tarifaires lancées par l’administration de Donald Trump pour définir l’enjeu de l’élection, à savoir qui – de Carney ou de Pierre Poilievre, le chef du Parti conservateur – serait le plus capable de « défendre l’existence du Canada et sa souveraineté ».

« Félicitations au premier ministre Mark Carney pour sa victoire électorale hier soir », a dit Bea Bruske, présidente du Congrès du travail du Canada. « Les syndicats canadiens, qui représentent plus de 3 millions de travailleurs, sont prêts à travailler avec ce gouvernement pour réaliser de véritables progrès. »

D’autres grands syndicats ont fait des promesses de soutien similaires.

« Mais les travailleurs n’ont pas d’intérêts de classe communs avec les patrons, leurs partis et leur gouvernement, a ajouté Tessier. L’été dernier, j’ai participé à la grève de milliers de travailleurs du transport ferroviaire de marchandises à travers le Canada pour réclamer des conditions de travail sécuritaires. Les travailleurs des ports et des postes ont fait grève pour des raisons semblables l’automne dernier. À chaque fois, le gouvernement libéral fédéral a eu recours à une loi anti-ouvrière pour rendre ces grèves illégales et imposer l’arbitrage obligatoire à 70 000 travailleurs.

« Le gouvernement libéral nouvellement élu va agir au nom des riches au pouvoir et poursuivre la campagne antisyndicale de l’administration précédente, a-t-il dit. Il va s’attaquer à la liberté d’expression, de réunion et de grève, des outils dont nous avons besoin pour nous organiser et défendre nos syndicats et nos intérêts de classe. »

Trois jours après l’élection, Philippe Tessier et Katy LeRougetel se sont joints à des centaines de syndiqués à Montréal à l’occasion de la Journée internationale des travailleurs. LeRougetel y a rencontré Guillaume Picard, employé de musée et membre de la Centrale des syndicats démocratiques.

« Il n’y avait pas vraiment d’alternative satisfaisante dans les élections, a-t-il dit. Défendre l’économie et défendre les travailleurs sont deux choses totalement différentes. Nous sommes en négociation pour un nouvelle convention collective et la direction a refusé nos revendications salariales à cause des tarifs douaniers de Trump. Mais nous prévoyons d’autres actions pour soutenir nos revendications. »

« C’est un bon exemple pour tous les syndicats, a répondu LeRougetel. Les travailleurs doivent se battre pour ce dont nous avons besoin contre les patrons et leur gouvernement. »

Une rupture de classe s’impose

Ces questions et plusieurs autres ont été débattues lors d’un rassemblement de campagne de la Ligue communiste accueilli par le Forum ouvrier du Militant le 26 avril.

LeRougetel a montré le tract de campagne de la Ligue communiste, qui titrait : « La lutte pour le pouvoir ouvrier est cruciale pour le progrès de l’humanité ».

« La seule force capable d’arrêter la marche de l’impérialisme vers le fascisme et une troisième guerre mondiale nucléaire, a-t-elle dit, c’est la classe ouvrière. La Ligue communiste fait campagne 365 jours par année pour construire le parti capable de conduire des millions de travailleurs à enlever le pouvoir des mains des fauteurs de guerre et à se joindre à la lutte internationale pour le socialisme. »

« Notre campagne commence avec le monde, a ajouté Tessier, et la nécessité de rompre avec les partis des patrons. » Il a décrit comment il a commencé sa campagne en participant à la Foire internationale du livre de La Havane en février à Cuba, puis en apportant sa solidarité au congrès du Syndicat des travailleurs de la canne à sucre, majoritairement haïtiens, en République Dominicaine.

Les partisans de la campagne ont manifesté avec les travailleurs de l’éducation en grève en Alberta et avec les 8 000 travailleurs des centres de la petite enfance qui ont manifesté devant l’Assemblée nationale à Québec le 3 avril pour réclamer de meilleurs salaires et conditions de travail. Ils ont défendu la lutte du peuple ukrainien pour sa souveraineté et se sont joints aux manifestations pour défendre Israël comme refuge contre la haine des juifs et les pogroms.

« Les deux grandes révolutions socialistes du vingtième siècle, a dit Tessier, — la révolution bolchevique d’octobre 1917 dirigée par Vladimir Lénine en Russie et la révolution cubaine de 1959 dirigée par Fidel Castro — ont conduit des millions de travailleurs et de paysans à renverser le capitalisme et à prendre le pouvoir politique. Elles montrent que la lutte pour le pouvoir des travailleurs n’est pas seulement nécessaire, mais possible. »