Les dirigeants canadiens cherchent à imposer des restrictions sévères à l’immigration

Joe Young
le 14 juillet 2025
Marche à Toronto en septembre 2023 pour défendre les droits des immigrants.?Les dirigeants canadiens veulent faire adopter la « Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière »,?qui vise à diviser la classe ouvrière et à affaiblir les syndicats.
Humber Et Cetera/Santiago Helou QuinteroMarche à Toronto en septembre 2023 pour défendre les droits des immigrants.?Les dirigeants canadiens veulent faire adopter la « Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière »,?qui vise à diviser la classe ouvrière et à affaiblir les syndicats.

MONTRÉAL – Le 3 juin le premier ministre libéral Mark Carney a présenté au Parlement canadien le projet de loi C-2, « Loi visant une sécurité rigoureuse à la frontière », qui constitue une attaque en règle contre les droits des immigrants et contre l’ensemble de la classe ouvrière.

Le Congrès du travail du Canada, le Syndicat canadien de la fonction publique, l’Église unie du Canada, Oxfam Canada et le Réseau des droits des migrants, soit 176 organisations au total, se sont unis le 18 juin pour demander au gouvernement de retirer le projet de loi. Le gouvernement doit « assurer l’égalité des droits, un traitement équitable et un accès non discriminatoire au statut de résident permanent pour tous » expliquait leur déclaration, ainsi que « maintenir le droit d’asile et l’application régulière de la loi dans la détermination du statut de réfugié ».

Le gouvernement affirme que les pouvoirs étendus que lui confère le projet de loi C-2 sont nécessaires pour lutter contre les « groupes criminels organisés » et pour « maintenir la sécurité de notre pays ». Mais « notre pays » est une fiction. D’un côté, il y a les intérêts des dirigeants capitalistes du Canada, que le gouvernement sert, et de l’autre, il y a les intérêts des travailleurs et des agriculteurs qui vivent et travaillent ici.

Le véritable objectif de ce projet de loi est de diviser et d’affaiblir la classe ouvrière et nos syndicats et de porter atteinte à nos droits.

En décembre dernier, Ottawa a annoncé son intention de dépenser plus d’un milliard de dollars pour renforcer la « sécurité » à la frontière entre le Canada et les États-Unis, sous prétexte d’empêcher l’immigration illégale et le trafic de fentanyl. Une semaine après avoir présenté le projet de loi C-2, Mark Carney a annoncé une augmentation massive des dépenses militaires, avec une hausse de plus de 9 milliards de dollars canadiens (6,6 milliards $ US).

Alors que la crise du capitalisme s’aggrave, les dirigeants canadiens cherchent à trouver un moyen de défendre leurs ressources, leurs profits et leur place dans la hiérarchie impérialiste face à leurs rivaux du monde entier. Ottawa cherche également à faire face à la résistance croissante des travailleurs contre la hausse des prix et la détérioration des conditions de travail. Le gouvernement a intensifié ses attaques contre le droit de grève en utilisant de nouvelles lois pour imposer le retour au travail aux cheminots, aux postiers et aux débardeurs.

Le projet de loi renforce considérablement le pouvoir du gouvernement

Le projet de loi C-2 interdirait toute nouvelle demande d’asile de la part d’étudiants et de résidents temporaires après une période d’un an, même si les conditions se sont aggravées dans leur pays d’origine. Il serait pratiquement impossible à la plupart des personnes qui entrent au Canada depuis les États-Unis de faire examiner leur demande de statut de réfugié.

Par conséquence, explique Amnistie internationale, « les personnes qui sont victimes de persécutions, de tortures ou pire dans leurs pays d’origine pourraient se voir injustement refuser la protection du Canada en tant que réfugiés. »

Le projet de loi donne au gouvernement un pouvoir accru pour révoquer ou suspendre arbitrairement « les visas de résidence permanente, les permis d’études et de travail, les visas de résident temporaire et autres documents relatifs au statut d’immigrant » s’il estime que « l’intérêt public le justifie. »

Les personnes qui soi-disant franchissent illégalement la frontière, c’est-à-dire qui n’entrent pas au Canada par un poste frontalier officiel, n’auront que 14 jours pour présenter une demande d’asile. Les arrêtés d’expulsion prendront effet le jour même du retrait de la demande d’asile, ce qui accélérera considérablement les expulsions. Ottawa expulse déjà des milliers d’immigrants chaque année.

« Stigmatiser les réfugiés et les associer à des problèmes de sécurité publique dont ils ne sont pas responsables est cruel, irresponsable et augmente le risque qu’ils soient victimes de violence, de harcèlement et de discrimination dans leur vie quotidienne », a déclaré aux médias France-Isabelle Langlois, directrice d’Amnistie internationale pour le Canada francophone.

Le Réseau des droits des migrants a déclaré que le projet de loi « crée une énorme machine à expulser : le projet de loi permet aux autorités d’annuler ou de suspendre les documents d’immigration de GROUPES ENTIERS de personnes sans passer par les tribunaux. »

Le projet de loi confère de nouveaux pouvoirs étendus à la police et aux agences de renseignement. Il donne aux services de police le droit de fouiller le courrier personnel et de partager vos informations privées avec tous les niveaux de gouvernement. Il oblige les fournisseurs d’accès à internet et au téléphone à aider la police à espionner en installant « tout dispositif, équipement ou autre élément susceptible de leur permettre » de saisir des informations.

Katy LeRougetel, candidate de la Ligue communiste à la mairie de Montréal, a participé le 8 juin à une manifestation de 80 personnes contre le projet de loi, organisée par Solidarité sans frontières.

« Exiger le statut de résident permanent aujourd’hui  pour tous les immigrants est une question de vie ou de mort pour l’ensemble du mouvement syndical », a dit Katy LeRougetel aux travailleurs qu’elle a rencontrés sur place. « Si les patrons peuvent obliger certains d’entre nous à accepter des conditions de travail dangereuses et des bas salaires, aucun d’entre nous n’est en sécurité. »

« Nos syndicats doivent se mobiliser pour exiger : ‘Non aux expulsions !’ Nous devons répondre à la stratégie de diviser pour mieux régner de la classe dirigeante par ‘Une attaque contre un est une attaque contre tous.’ »