Un débat s’intensifie entre les gouvernements américain et israélien, et au sein de la classe dirigeante d’Israël elle-même, sur l’opportunité d’entreprendre une action militaire contre les installations nucléaires de l’Iran ou de s’en tenir pour l’instant aux sanctions écrasantes et à d’autres moyens de pression dans le cadre d’une campagne impérialiste pour forcer Téhéran à abandonner son programme nucléaire.
Dans un geste qui visait clairement à approfondir l’isolement international de Téhéran, le gouvernement canadien a fermé son ambassade à Téhéran le 7 septembre et expulsé les diplomates iraniens.
Washington et Tel-Aviv soutiennent que le programme iranien est destiné au développement d’armes nucléaires et déclarent qu’ils sont déterminés à y mettre fin par tous les moyens, y compris par la force s’ ils le jugent nécessaire. Le désaccord porte sur l’opportunité de lancer une attaque aérienne en ce moment. Téhéran affirme que son programme est pour la production d’énergie électrique dont l’Iran a besoin et d’isotopes médicaux pour le traitement du cancer.
Les sanctions impérialistes ont eu un impact sur l’économie iranienne et les travailleurs. Quatre-vingts pour cent du budget national de l’Iran repose sur les exportations de pétrole, qui ont été particulièrement ciblées par Washington et les mesures de l’Union européenne.
Mais les dirigeants iraniens ont jusqu’à présent refusé de se plier aux exigences des impérialistes.
« L’Iran n’a jamais été à la recherche d’armes nucléaires et il n’abandonnera jamais son droit à l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire, » a déclaré l’ayatollah Ali Khamenei, le guide suprême de l’Iran, aux délégués représentant 120 nations lors de l’ouverture du seizième Sommet du Mouvement des non-alignés le 30 août à Téhéran, réitérant la position de longue date de Téhéran.
Depuis le début de l’année, le gouvernement iranien est engagé dans deux séries de pourparlers sur son programme nucléaire, l’une avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) de l’ONU, l’autre avec le soi-disant groupe P5+1. Celui-ci comprend les cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies : la Chine, la France, la Russie, le Royaume-Uni et les États-Unis avec en plus l’Allemagne.
Mais aucun accord concret n’a été conclu. Les puissances impérialistes utilisent ces pourparlers pour faire pression sur le gouvernement iranien.
Les opposants au programme nucléaire de l’Iran se sont servis d’un rapport de l’AIEA émis le 30 août comme preuve supplémentaire que Téhéran maintient le cap sur la production d’armes nucléaires. Le document affirme que l’Iran a doublé le nombre de centrifugeuses d’enrichissement d’uranium dans son usine de Fordow pour atteindre plus de 2 000 appareils et a produit 45 kilos d’uranium enrichi à plus haute teneur depuis mai, soit une augmentation de quelque 20 pour cent de ses stocks.
Il a minimisé le fait que moins de 700 centrifugeuses d’enrichissement d’uranium en Iran sont en service à Fordow et qu’une grande partie de l’uranium nouvellement enrichi a été converti sous forme de métal pour être utilisé dans un réacteur de recherche nucléaire. Ainsi converti, cet uranium est plus difficile à enrichir en matière nucléaire à des fins militaires.
Les dirigeants israéliens sont divisés
Dans ce contexte, une avalanche de déclarations et de citations anonymes faites aux médias israéliens ont laissé entendre que Tel-Aviv envisage de lancer une attaque aérienne unilatérale contre les installations nucléaires iraniennes. Un débat similaire a eu lieu l’automne dernier mais s’est atténué après que Washington et l’Union européenne ont adopté une série de nouvelles sanctions contre l’Iran.
Les principaux défenseurs de ce cours, selon la presse, sont le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou et le ministre de la Défense Ehud Barak. Les deux soutiennent que le temps viendra où une opération militaire contre l’installation nucléaire Fordow en Iran, qui est profondément enterrée sous une montagne, ne sera plus possible sans l’implication directe de Washington.
L’éruption de ce débat a incité l’administration américaine à envoyer en Israël un flot régulier de hauts responsables U.S. et d’officiers militaires pendant l’été, y compris la secrétaire d’État Hillary Clinton et le secrétaire à la Défense Leon Panetta, dans le but de convaincre Tel-Aviv de s’abstenir de toute attaque contre l’Iran en ce moment.
« Au lieu de faire pression efficacement sur l’Iran, [le président Barack] Obama et ses gens ont fait pression sur nous pour que nous n’attaquions pas, » a dit Nétanyahou, comme en colère, à l’ambassadeur américain Dan Shapiro, selon le journal israélien Yedioth Ahronoth le 31 août.
Mais les pressions de Nétanyahou et de Barak pour un durcissement des mesures contre l’Iran ont également créé une division ouverte au sein de la classe dirigeante israélienne. Depuis le début de l’été, le chef d’état-major de l’armée en Israël, le commandant en chef de l’armée de l’air, les dirigeants des deux principaux services de renseignement (le Mossad et Shin Bet), le président Shimon Peres et les membres du propre cabinet de Nétanyahou, entre autres, se sont publiquement opposés à une attaque unilatérale israélienne contre l’Iran.
Le candidat présidentiel républicain Mitt Romney, qui avait initialement prétendu avoir une ligne plus dure sur l’Iran, préconise maintenant des « sanctions paralysantes » un cours très similaire à celui mis en œuvre par son adversaire démocrate Barack Obama.
Pendant ce temps, Washington intensifie les préparatifs militaires et les pressions avec un exercice de déminage du 16 au 27 septembre impliquant plus de 25 pays dans le golfe Arabo-Persique, le golfe d’Oman et le golfe d’Aden. Toutes ces eaux entourent le détroit d’Ormuz, passage stratégique en mer pour les transporteurs de pétrole, que Téhéran a menacé de fermer en représailles aux sanctions impérialistes.