Suite au meurtre de George Floyd par un policier à Minneapolis, une puissante vague de protestations a balayé le monde entier. Elle a gagné des centaines de petites villes et de zones rurales à travers les États-Unis et entraîné une toute nouvelle génération de jeunes dans l’activité politique. Alors que des centaines de milliers de personnes manifestaient, les quatre policiers impliqués dans le meurtre de George Floyd ont été arrêtés et inculpés de graves accusations.
Les protestations se poursuivent, alors que des luttes nouvelles et de longue date se sont répandues pour que des policiers soient poursuivis pour brutalité et meurtres. C’est le cas du mouvement qui exige que des accusations soient portées contre Garrett Rolfe, le flic qui a abattu et tué Rayshard Brooks à Atlanta le 12 juin.
Au même moment, des personnalités politiques libérales cherchent de plus en plus à transformer les protestations en une discussion et un débat sur les mesures « pratiques » qui peuvent être prises pour mettre fin au racisme et à la brutalité policière.
Leur objectif est double. Premièrement, ils essaient de convaincre les gens qui manifestent dans la rue qu’il existe des moyens de « résoudre » la brutalité policière avec des réformes du système de « justice » criminelle capitaliste. Et deuxièmement, qu’ils devraient maintenant consacrer leurs efforts à travailler pour des politiciens du moindre mal — principalement du Parti Démocrate — pour arrêter le « fasciste » Donald Trump.
Leurs mots d’ordre sont « couper les fonds de la police », « service de police et non force de police », nous devons éliminer les « pommes pourries » et des propositions similaires. Ce qu’ils partagent en commun, c’est l’idée que le système capitaliste et ses flics, ses tribunaux et ses prisons peuvent être réformés. Mais ils ne peuvent pas l’être.
Beaucoup de ceux qui préconisent ces mesures le savent. C’est le cas de Nicholas Kristof, l’un des dizaines de scribes libéraux des pages d’opinion du New York Times. « L’idée derrière l’idée de couper les fonds de la police telle que la plupart la conçoivent » a-t-il écrit le 10 juin, « n’est pas d’éliminer tous les policiers, mais de repenser les moyens de nous protéger qui n’impliquent pas nécessairement l’application traditionnelle de la loi. »
En d’autres termes, on laisserait les flics s’occuper du « crime » tandis que beaucoup d’autres réalités, comme l’itinérance et la toxicomanie, serait prises en charge par des armées de travailleurs sociaux.
Chaque fois qu’il y a eu des grandes mobilisations contre la brutalité policière, ce sont les réformes que les libéraux proposent.
Mais la réalité, c’est que sous le capitalisme, le rôle des policiers n’est pas de lutter contre le crime. C’est de protéger la propriété privée et le pouvoir politique des patrons et des banquiers capitalistes. Cela a été parfaitement décrit pas Jack Barnes, secrétaire du Parti socialiste des travailleurs, dans son introduction à Malcom X, la libération des Noirs et la voie vers le pouvoir ouvrier, l’un des meilleurs livres que vous pouvez lire pour comprendre ce qui se passe aujourd’hui. Barnes dit :
« Nous servons et protégeons » — à travers les États-Unis, cette promesse est affichée sur les voitures de police à partir desquelles jour après jour les flics harcèlent et brutalisent les travailleurs, visant de manière disproportionnée les Américains africains, les Latinos et les immigrés. Pour les travailleurs, ces mots seront toujours un mensonge méprisable. Mais pour la classe dirigeante et les couches moyennes privilégiées, ils sont un résumé fidèle de la fonction de l’appareil d’État US : les forces armées ; la multitude d’agences policières et d’espionnage des municipalités, des États, du gouvernement fédéral et de l’armée ; les tribunaux, les requins garants des cautions judiciaires et les agents de probation et de libération conditionnelle ; les prisons et pénitenciers surpeuplés, avec leur déshumanisantes périodes de confinement en cellule, toujours plus fréquentes, et leur vie sous le contrôle de gangs qu’organisent les responsables du « système pénal » et que surveillent des gardiens de prison voyous (un véritable microcosme des rapports sociaux bourgeois). L’État US est le plus grand appareil répressif de l’histoire mondiale, avec le taux d’incarcération le plus élevé — et toujours croissant — de tous les pays sur terre.
Ces institutions de domination de classe, de « loi et ordre » bourgeois, servent et protègent brutalement la propriété, les profits et les prérogatives prises pour acquises de la classe capitaliste US — depuis les rues, les usines, les champs, les mines, les passages frontaliers et les prisons à travers les États-Unis jusqu’à l’Afghanistan, le Pakistan, l’Irak et au-delà.
Nous pouvons forcer la classe dirigeante à faire des concessions en nous organisant et en combattant leurs attaques contre nos emplois, nos conditions de vie et nos droits politiques. Nous pouvons la forcer à poursuivre — et condamner — les flics qui abattent nos amis, notre famille et nos compagnons et compagnes de travail.
Mais pas en cherchant des moyens de réparer et réformer ce qui est fondamentalement un système capitaliste inhumain, divisé en classes, axé sur le profit et intrinsèquement brutal. Ça, ce n’est tout simplement pas possible.
Les flics font ce qu’ils font parce que c’est ce dont les patrons et leurs parasites ont besoin. La seule façon de rester au sommet pour une petite minorité, dont la richesse et la position sociale sont basées sur l’exploitation et la misère de la grande majorité de l’humanité est de nous convaincre qu’il n’y a pas d’alternative réaliste et de déployer son système de « justice » criminelle pour intimider et brutaliser les travailleurs afin de nous garder sous contrôle.
Les flics n’ont pas existé depuis le début de l’humanité. Les premiers départements de police sont apparus dans les années 1830, alors que le capitalisme est devenu le système social dominant dans le monde. Ils sont nés des veilles de nuit privée financées par les patrons pour protéger leurs usines, leurs entrepôts et leurs biens dans le Nord. Dans le Sud, ils sont issus des patrouilles organisées par les patrons des plantations pour brutaliser et garder les esclaves sur les terres des maîtres.
Ces nouvelles institutions gouvernementales d’oppression et de brutalité sont apparues en même temps que les prisons, les maisons de travail, les chaines de forçats et d’autres institutions essentielles à la domination capitaliste.
La seule chose qui puisse les éliminer est de supprimer le système capitaliste lui-même. Comme le dit Barnes :
Seule la conquête et l’utilisation du pouvoir d’État par la classe ouvrière et l’expropriation du capital financier peuvent jeter les bases d’un monde fondé non pas sur l’exploitation, la violence, la discrimination raciale, des ordres hiérarchiques de classe et la concurrence des loups qui se mangent entre eux, mais sur la solidarité entre les travailleurs qui encourage la créativité à vie et reconnaît la valeur de chaque individu, quels que soient son sexe, son origine nationale ou la couleur de sa peau.
Un monde socialiste.
L’ancien président Barack Obama a souvent cherché à décourager les travailleurs de s’organiser pour lutter contre les attaques du gouvernement et des patrons en les exhortant à « travailler au sein du système » et à se tourner tous les quatre ans vers le moindre des maux politiques capitalistes. « Ne huez pas, a-t-il dit, votez ».
Mais la voie politique à suivre ne consiste pas à vous pincer le nez et à choisir le moins pire des porte-paroles capitalistes, puis à le regretter pendant les quatre années suivantes. Nous devons continuer à lutter contre les attaques des employeurs et de leur gouvernement, que ce soit sur les piquets de grève ou dans les manifestations contre la brutalité policière, les guerres des dirigeants à l’étranger ou d’autres manifestations de la domination capitaliste.
Nous devons nous battre pour aider nos luttes à obtenir le plus large soutien et impliquer le plus grand nombre de travailleurs, d’agriculteurs, de jeunes et d’autres exploités et opprimés par le capitalisme. Avec discipline, des objectifs clairs et avec un soutien croissant.
La voie en avant est de rompre avec les démocrates et les républicains — les partis jumeaux des dirigeants capitalistes — pour former notre propre parti politique, un parti des travailleurs. Et utiliser ce parti pour tracer un cours pour prendre le pouvoir politique entre nos mains.
Les flics sont un instrument indispensable du pouvoir capitaliste. Seule la fin de l’exploitation et de l’oppression capitalistes peut nous débarrasser de leur brutalité.