Ouvrez la porte à des pourparlers pour la reconnaissance d’un État palestinien et d’Israël

Seth Galinsky
le 17 février 2020

Le plan très attendu de l’administration de Donald Trump, pour parvenir à un accord négocié au Moyen-Orient, demande aux groupes palestiniens de reconnaître l’État d’Israël et au gouvernement israélien de reconnaître un État palestinien.

Lors d’une conférence de presse à la Maison-Blanche le 28 janvier, en présence du premier ministre israélien Benjamin Netanyahou, le président Trump a annoncé le plan qui, a-t-il dit, peut servir de point de départ de négociations qui pourraient aboutir à des résultats différents que les revers qu’ont subis les présidents, aussi bien démocrates que républicains, depuis les années 1990.

Cette conférence de presse à la Maison-Blanche a eu lieu en présence des ambassadeurs des régimes capitalistes des Émirats arabes unis, du Bahrein et de Oman. L’ambassadeur des Émirats arabes unis Yousef Al Otaïba a dit que le plan est « un point de départ important pour retourner à la table de négociation. »

Les gouvernements de l’Égypte, de l’Arabie saoudite et du Qatar ont aussi salué l’initiative de l’administration des États-Unis. Le gouvernement du Qatar, qui a fourni des centaines de millions de dollars aussi bien au Hamas dans la bande de Gaza qu’à l’Autorité palestinienne en Cisjordanie, a publié une déclaration dans laquelle il a dit apprécier « tout effort en direction d’une paix durable et juste dans les territoires occupés de la Palestine. »

C’est un revirement par rapport à un passé pas si lointain, quand la plupart des gouvernements arabes fournissaient une aide financière et des appuis politiques aux dirigeants de l’Autorité palestinienne et du Hamas pour qu’ils refusent de reconnaître le droit d’Israël d’exister en tant qu’État juif.

Les régimes de la région, dont la plupart ont une direction majoritairement sunnite, dépendent de façon croissante du soutien militaire des États-Unis et de relations plus étroites avec le gouvernement israélien afin de contrer les violents efforts de Téhéran pour étendre son influence.

« Je rejette complètement ce plan, » a répondu le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas lors d’une réunion spéciale de la Ligue arabe, le 1er février. Celui-ci refuse même de lire le document de 181 pages. « Quand Trump m’a demandé de lui parler au téléphone, j’ai refusé, » a-t-il ajouté.

La Ligue, y compris des délégués provenant de l’Arabie saoudite et d’autres gouvernements qui ont exprimé leur appui à de nouveaux pourparlers basés sur les propositions de l’administration Trump, ont voté de façon unanime pour appuyer Mahmoud Abbas.

Jared Kushner, l’architecte principal de ce plan et le gendre de Trump, a insisté sur le fait que pour lui tout est ouvert à la négociation. Dans une entrevue avec le réseau de nouvelles égyptien MBC Masr, il a précisé que « si les Palestiniens n’aiment pas où la ligne est tracée, ils devraient venir et nous dire où ils veulent qu’elle le soit. »

L’administration a aussi fait pression sur le gouvernement israélien pour qu’il suspende la construction de nouvelles colonies dans les territoires occupés.

Le fait est que les travailleurs en Cisjordanie et à Gaza ne cessent de perdre confiance dans la direction de l’Autorité palestinienne et celle du Hamas. Ils en ont assez de leur cours politique sans issue. Le Hamas a réprimé des manifestations et incarcéré des opposants alors que s’accroît le mécontentement face à sa domination, même s’il a conclu des accords avec le gouvernement israélien pour permettre à des milliers de Gazaouis de travailler en Israël.

Chaque fois que les misleaders palestiniens refusent de saisir une opportunité de discuter un règlement, ils se retrouvent dans une situation encore pire. « La totalité des efforts de paix arabo-israéliens peut se résumer de façon succincte, » a dit le chroniqueur du New York Times et ancien rédacteur en chef du Jerusalem Post, dans sa chronique du 30 janvier. « Presque chaque fois qu’on a dit non du côté arabe, on a fini par se retrouver avec moins. »

Le célèbre journaliste saoudien Abdulraham al-Rashed a écrit dans Asharq Al-Awsat : « Le plus grand danger pour les intérêts palestiniens maintenant est de ne rien faire et de continuer à attendre un miracle. »

Tous ces facteurs montrent que le plan de l’administration Trump a plus de chances de réussir que toute autre proposition depuis des décennies.

Le « point de départ » de la proposition

Selon la proposition de l’administration Trump, environ 70 pour cent du territoire de la Cisjordanie serait sous domination palestinienne et quelque 30 pour cent, autour des colonies israéliennes, serait cédé à Israël.

Une « Jérusalem indivisible » et sous contrôle israélien deviendrait la capitale d’Israël. Le plan propose que la capitale de la Palestine se retrouve dans des quartiers à l’est de ce qui est traditionnellement Jérusalem-Est, en dehors de la barrière de « sécurité » actuelle.

L’accord promet un moratoire sur la construction de nouvelles colonies israéliennes pendant quatre ans. En échange de terres cédées à Israël, il étendrait la Cisjordanie du côté sud et donnerait à l’État palestinien deux zones supplémentaires, près de Gaza et de l’Égypte.

La proposition de l’administration Trump appelle également au désarmement du Hamas et du Jihad islamique dans la bande de Gaza, à la construction, pour la première fois, d’une ligne ferroviaire à grande vitesse entre Gaza et la Cisjordanie et offre 50 milliards de dollars en « assistance » économique.

L’administration Trump fait également pression sur le gouvernement israélien pour qu’il s’abstienne d’adopter de nouvelles mesures afin de laisser la plus grande chance à l’ouverture des négociations. Lorsque Nétanyahou a tenté d’utiliser l’accord proposé pour faire adopter une législation imposant la loi israélienne sur les colonies en Cisjordanie, Jared Kushner lui a déconseillé de le faire.

Les négociations, une « nécessité politique »

Lorsque l’administration Trump, soutenue par le chef de la minorité au Sénat, le démocrate Charles Schumer, a officiellement reconnu Jérusalem comme capitale d’Israël en décembre 2017, le Parti socialiste des travailleurs a déclaré que cela montrait « la nécessité politique pour les gouvernements israélien et arabes ainsi que pour les organisations palestiniennes de commencer immédiatement des négociations pour reconnaître autant Israël qu’un État palestinien indépendant. »

La nouvelle proposition de Trump appelle à la même réponse.

La déclaration du Parti socialiste des travailleurs note que les négociations « doivent reconnaître le droit des Juifs partout dans le monde de se réfugier en Israël face à la montée mondiale de la haine contre les Juifs et la violence antisémite, ainsi que le droit inconditionnel du peuple palestinien dépossédé à une patrie souveraine, avec un territoire d’un seul tenant comprenant Jérusalem-Est, conquis et occupé par le gouvernement israélien durant la guerre de 1967. »

Un accord dans ce sens ferait progresser la capacité des travailleurs « de toutes les nationalités, croyances religieuses et allégeances politiques d’Israël et de la Palestine [d’]utiliser et défendre leur espace pour s’exprimer, s’organiser et pour commencer à redresser l’héritage souillé de sang de la domination impérialiste et de l’exploitation capitaliste » dans la région.

Le Parti socialiste des travailleurs ajoute que face à des décennies de défaites et de revers pour les travailleurs au Moyen-Orient, causés par des directions anti-ouvrières, qu’elles soient staliniennes, nationalistes bourgeoises ou islamistes, les travailleurs ont besoin d’un point de départ différent : « les intérêts de classe et la solidarité des travailleurs et des petits agriculteurs au Moyen-Orient, qu’ils soient palestiniens, juifs, arabes, kurdes, turcs, persans ou autres, et quelles que soient leurs croyances religieuses ou autres, et des travailleurs aux États-Unis et dans le monde.

« Nous sommes pour tout ce qui aide les travailleurs à s’organiser et à agir ensemble pour faire avancer nos revendications et nos luttes contre les gouvernements capitalistes et les classes dirigeantes qui nous exploitent et nous oppriment […].

« Nous sommes pour tout ce qui renouvelle notre solidarité de classe et notre confiance en nous et nous fait avancer sur la voie révolutionnaire vers une lutte unie pour le pouvoir ouvrier. »