Les événements des 7 et 8 mars marquant le cinquantième anniversaire de la marche de Selma à Montgomery pour le droit de vote en 1965, illustrent à quel point les États-Unis ont été transformés à jamais par le mouvement révolutionnaire qui a renversé Jim Crow. Mais ils révèlent également les tâches inachevées dans cette lutte.
Le boycott des bus de Montgomery en 1955-1956, la bataille de Birmingham en 1963, la lutte pour le droit de vote à Selma deux ans plus tard et d’autres innombrables batailles, ont été menées par les travailleurs et les agriculteurs du Sud et leurs alliés du Nord, qui ont fait preuve de discipline, de courage et d’une confiance inébranlable dans leur détermination et la puissance de leur nombre.
Ce mouvement en a été un de mobilisations de masse véritables qui ont changé de façon permanente la conscience non seulement des milliers de personnes qui ont participé à la marche, qui ont combattu les attaques brutales et ont gagné, mais aussi celle de millions de personnes qui à travers le pays ont été gagnées à la cause. Les batailles ont renforcé l’ensemble de la classe ouvrière. Le renversement de Jim Crow a balayé un instrument-clé que les employeurs et leur gouvernement ont utilisé pendant près d’un siècle pour diviser et affaiblir les travailleurs.
Cette lutte a renforcé la révolution cubaine et son aide internationaliste en Afrique, la lutte des républicains irlandais contre l’impérialisme britannique, la bataille dirigée par le Congrès national africain pour renverser l’odieux régime de l’apartheid en Afrique du Sud et d’autres encore.
Elle a produit un leader révolutionnaire du calibre de Malcolm X, qui voyait le mouvement noir aux États-Unis comme faisant partie de la lutte mondiale contre les classes possédantes et qui a démasqué le gouvernement américain et les deux partis capitalistes comme ennemis de l’humanité. Les éditions Pathfinder continuent de publier ses écrits aujourd’hui.
Ceux qui disent que rien n’a changé de façon significative ou qui voient « un nouveau Jim Crow, » comme celui imposé après la défaite sanglante de la reconstruction radicale dans les années 1870, se trompent. La révolution des droits civils a porté un coup fatal aux lynchages, à la ségrégation dans les établissements publics, aux lois interdisant le mariage entre les Américains africains et les caucasiens, et bien plus encore.
De nombreuses tâches dans la lutte pour mettre fin à la discrimination raciale demeurent. Sous le capitalisme, l’oppression raciste est endémique.
La ségrégation a été déracinée à Selma. Mais la ville est l’une des plus pauvres d’Alabama. La population est noire à 80 pour cent, le taux de chômage officiel est de 11 pour cent et 42 pour cent des habitants vivent sous le seuil fédéral de pauvreté.
En 2013, la Cour suprême a porté un coup à la Loi sur le droit de vote, celle-là même pour laquelle les marcheurs de Selma ont versé leur sang. Cette décision a ouvert la porte à des mesures discriminatoires qui frappent de manière disproportionnée les travailleurs qui sont Américains africains ou Latinos.
L’importante participation, très largement prolétarienne, à la marche de Selma ; les explosions continuelles de résistance face à la brutalité policière ; la détermination des travailleurs du pétrole et de ceux des chemins de fer pour conquérir le contrôle sur la sécurité au travail ; les actions des employés de Walmart pour obtenir 15 $ de l’heure, un travail à temps plein et un syndicat — tous ces combats se renforcent de plus en plus mutuellement. Ils démontrent la nécessité — et la possibilité — de construire un mouvement de masse révolutionnaire et internationaliste de millions de personnes qui, à travers l’expérience et en tirant les leçons du passé, deviendra assez puissant pour mettre fin à la dictature du capital, détruire la base matérielle du racisme à la racine et construire une nouvelle société fondée sur la solidarité humaine et les intérêts de la majorité laborieuse.