Accord avec l’Iran : Obama tente de stabiliser la région pour l’impérialisme

Brian Williams
le 27 juillet 2015

Des responsables gouvernementaux américains et iraniens ont annoncé le 14 juillet qu’ils avaient conclu un accord nucléaire. L’obtention d’un tel accord a été un élément central de la politique étrangère de l’administration Barack Obama au cours des derniers mois, dans le cadre des efforts déployés par les dirigeants des États-Unis pour défendre leurs intérêts au Moyen-Orient face à la désintégration de l’ordre impérialiste en place là-bas depuis des décennies.

L’administration a pour objectif de permettre une alliance politique plus étroite avec Téhéran, en particulier dans la lutte contre l’État islamique (EI). La milice Hezbollah soutenue par l’Iran est un point majeur de soutien à la dictature de Bachar al-Assad en Syrie et Téhéran finance et entraîne les milices chiites qui combattent aux côtés des forces gouvernementales en Irak.

L’accord entre Téhéran et les gouvernements des États-Unis, du Royaume-Uni, de la France, de la Chine, de la Russie et de l’Allemagne fixe des limites aux activités nucléaires du gouvernement iranien pour dix ans. Celles-ci comprennent la réduction du nombre de centrifugeuses pour l’enrichissement de l’uranium, la limitation à 3,67 pour cent du niveau d’enrichissement, bien en-dessous du niveau nécessaire pour la fabrication d’armes, et la diminution des stocks d’uranium faiblement enrichi, ce qui est censé faire augmenter à un an le temps nécessaire à l’Iran pour acquérir suffisamment de matières fissiles pour une arme.

L’Agence internationale de l’énergie atomique de l’ONU mènera des inspections envahissantes des mines d’uranium, installations militaires et usines de fabrication de l’Iran, telles que « peu d’autres pays en ont jusqu’ici acceptées, » selon le Wall Street Journal.

En échange, des sanctions financières et économiques imposées à l’Iran par les puissances impérialistes et l’ONU, dont certaines ont commencé en 2006, seraient levées dès que le gouvernement iranien sera déclaré en conformité avec les restrictions, ce qui devrait prendre au moins de six à neuf mois. Ces sanctions frappent surtout les travailleurs et les agriculteurs et ont conduit à l’augmentation du chômage, la baisse des salaires et la hausse des prix des denrées alimentaires. L’interdiction des ventes d’armes conventionnelles et du commerce des missiles balistiques et de leurs pièces restera en vigueur pendant encore cinq à huit ans.

L’accord sera maintenant débattu au Congrès au cours des 60 prochains jours. Obama a dit qu’il opposerait son veto à toute mesure qui le bloquerait.

Si les deux parties ratifiaient le pacte, le gouvernement iranien accéderait à 100 milliards de dollars en avoirs gelés que les puissances impérialistes ont saisis en vertu des sanctions et les ventes de pétrole pourraient augmenter.

L’accord a entraîné des tensions entre Washington et des alliés de longue date dans la région, d’Israël à l’Arabie saoudite. « Israël n’est pas lié par cet accord avec l’Iran car l’Iran continue à chercher notre destruction, » a dit le premier ministre Benjamin Netanyahu aux journalistes le 14 juillet.

L’avancée des Kurdes inquiète le gouvernement turc

L’accord avec Téhéran arrive au moment où les tensions s’avivent entre les combattants kurdes, qui font des avancées contre l’État islamique, et les dirigeants de la Turquie, que la perspective de l’établissement d’un territoire autonome par les Kurdes inquiète de plus en plus.

Dans un discours le 26 juin, le président turc Recep Tayyip Erdogan a déclaré que son gouvernement « ne permettra jamais » aux Kurdes d’établir un État « au nord de la Syrie. » Ankara a renforcé sa présence militaire le long de la frontière syrienne en déployant des chars d’assaut et des missiles anti-aériens ainsi que des troupes militaires supplémentaires.

Le général John Allen, émissaire spécial des États-Unis pour la coalition contre l’État islamique, s’est déplacé à Ankara le 7 juillet afin de rencontrer des responsables turcs à la suite de conjectures sur la possibilité que la Turquie lance une intervention militaire à l’intérieur de la Syrie. La Turquie est brouillée avec Washington pour avoir refusé d’adhérer à la « coalition » menée par les États-Unis et pour avoir demandé la création d’une zone tampon à l’intérieur du territoire syrien où les réfugiés vivraient sous contrôle militaire turc.

Le gouvernement iranien appuie le rejet par Ankara de la création d’un État kurde en Syrie. L’ambassadeur de l’Iran en Turquie, Ali Reza Bikdeli, a dit que les deux gouvernements sont d’accord pour préserver « l’unité » du territoire syrien, selon ARA News.

Quelque 30 millions de Kurdes en Turquie, Iran, Iraq et Syrie se battent contre l’oppression nationale et pour une patrie qui leur a été refusée par la division impérialiste de la région mise en place à la suite de la première guerre mondiale par Londres et Paris avec le soutien de Washington.

La prise de la ville stratégique de Tel Abyad à la frontière turque le mois dernier par les Unités de protection du peuple kurde (YPG) donne aux groupes kurdes du nord de la Syrie le contrôle de la plupart des quelque 400 kilomètres du territoire adjacent à la Turquie qui s’étend de Kobani jusqu’à la frontière entre la Syrie et l’Irak. Les combattants de l’État islamique ont aussi été chassés d’un tiers de la province de Raqqa.

Le commandement général de l’YPG a indiqué dans une déclaration le 10 juillet qu’au cours des 65 derniers jours ses combattants ont libéré 6 850 kilomètres carrés de territoire des mains du réactionnaire État islamique. « En comptant sur la volonté et les capacités de nos forces, nous pouvons vaincre Daesh [l’État islamique], » affirmait la déclaration, malgré « le bas niveau des ressources de nos forces et le manque de soutien en armes et munitions dans la région. » Craignant la montée de la lutte pour la souveraineté kurde, Washington, tout en menant quelques frappes aériennes dans la région, a refusé de doter l’YPG de l’équipement lourd nécessaire pour combattre plus efficacement l’EI.