WILMINGTON, Caroline du Nord — « Les gens viennent juste de se remettre de l’ouragan Matthew de 2016 et maintenant nous sommes de nouveau frappés par l’ouragan Florence, » a expliqué Samantha Worrell à trois correspondants ouvriers du Militant le 28 septembre. Elle vit dans la petite ville de Burgaw, près de Wilmington, et s’est abonnée au Militant après avoir rencontré des membres du SWP lors d’une manifestation d’enseignants à Raleigh au printemps dernier. Samantha Worrell et son amie Rebecca Stutts ont pris la journée pour accompagner les membres du Parti socialiste des travailleurs dans la région où l’ouragan Florence a touché terre le 14 septembre.
Elles voulaient nous présenter certains des travailleurs affectés par la tempête et nous montrer ce à quoi ils font face. L’équipe d’Atlanta comprenait Rachele Fruit, candidate du parti socialiste des travailleurs au poste de gouverneur de Géorgie, Sam Manuel et moi-même.
Nous avons expliqué à tous ceux que nous avons rencontrés que les défis auxquels ils sont confrontés sont le résultat d’une catastrophe sociale provoquée par les rouages de la loi de la jungle du système capitaliste. C’est un système qui protège les profits privés aux dépens des travailleurs et des agriculteurs, qui sont laissés à eux-mêmes pour tenter de faire face à une catastrophe.
Les autorités gouvernementales ont ordonné l’évacuation de 1,5 million de personnes dans les Carolines et en Virginie avant le passage de l’ouragan. Parmi celles qui l’ont fait, nombre d’entre elles ont été laissées à elles-mêmes pour trouver un moyen d’évacuer. Certaines ont tenté de laisser passer la tempête, des milliers d’autres sont revenues une semaine plus tard pour trouver leurs maisons endommagées ou détruites par les vents, les fortes pluies et les inondations sans précédent causés par la tempête. Des centaines de kilomètres de routes sont devenus impraticables.
« L’eau n’a pas atteint notre maison, » nous a confié Samantha Nelson, qui vit dans une maison mobile à proximité de Rocky Point. « Mais un tronçon de la route menant à notre maison s’est effondré. La pluie a pénétré par notre toit et s’est infiltrée dans les murs et les plafonds, de sorte que des moisissures se propagent dans toute la maison. Nous avons perdu l’électricité pendant 10 jours et avons dû jeter toute notre nourriture.
« Vous ne pouvez ni boire ni utiliser l’eau, parce qu’elle est contaminée, a-t-elle précisé. Les gens qui ont des puits doivent payer pour faire tester l’eau. L’air est vicié. » L’Agence fédérale de gestion des urgences et le personnel de la Croix-Rouge lui ont dit qu’elle devait quitter sa propriété pour pouvoir obtenir de l’aide.
« Les travailleurs et les agriculteurs de Cuba, dirigés par leur gouvernement révolutionnaire, montrent ce qui peut être fait pour minimiser la destruction et les pertes en vies humaines causées par une tempête comme Florence, » a dit la candidate du SWP, Rachele Fruit, à Samantha Nelson. « Les ouragans sont des évènements courants à Cuba. Même si c’est un pays pauvre comparé à l’impérialisme US, où les dirigeants s’enrichissent de l’exploitation des travailleurs et travailleuses du monde entier, le gouvernement cubain et les organisations de masse mobilisent les travailleurs, les agriculteurs et les ressources du pays pour se préparer à l’avance.
« Ils s’organisent pour évacuer les gens et leurs animaux, pour acheminer les matériaux afin que la reconstruction puisse commencer immédiatement, » a ajouté Rachele Fruit. « Ils peuvent le faire parce qu’ils ont fait une révolution socialiste et que les travailleurs et les agriculteurs sont au pouvoir. C’est la raison pour laquelle les ouragans ont causé beaucoup moins de décès à Cuba qu’aux États-Unis.
« Comme l’a dit Raúl Castro, personne à Cuba n’est laissé seul, » a-t-elle poursuivi.
« C’est tellement différent d’ici, » a répondu Samantha Nelson. « Ici, il n’y a pas de vraie préparation. »
Les travailleurs se portent volontaires pour aider
Samantha Nelson, Samantha Worrell et Rebecca Stutts ont décrit de nombreux exemples de travailleurs qui ont apporté leur aide. Alors qu’ils s’occupaient chacun de leur maison et de leur famille, ils ont également distribué de la nourriture et des vêtements et aidé les autres à trouver des solutions à court et à long terme pour répondre à leurs besoins urgents.
En date du 29 septembre, l’ouragan Florence avait fait 48 morts dont 37 en Caroline du Nord. L’un des décès les plus récents est celui d’un homme de 85 ans du comté de New Hanover qui a contracté une infection après s’être blessé en nettoyant des débris sur sa propriété.
Des centaines de personnes ont été secourues des eaux de crue par bateau ou par hélicoptère. Parmi les volontaires impliqués dans ces opérations de sauvetage, il y avait des membres de la Marine cajun, venus de Louisiane et d’ailleurs pour prêter main-forte. La « marine » s’est formée lors de l’ouragan Katrina en 2005 quand des travailleurs ayant des bateaux ont décidé d’agir pour sauver des personnes et des animaux domestiques malgré les tentatives des autorités locales pour bloquer leurs efforts.
Quelque 1500 personnes sont toujours dans des abris, que les autorités tentent de fermer. Plus de 550 autres sont logées dans des hôtels. Des milliers de personnes vivent dans des maisons endommagées ou dans des tentes sur leur propriété.
L’est de la Caroline du Nord est un centre des industries du porc et de la volaille. Au moins 32 lagunes de déchets de porc ont été inondées et cinq autres ont subi des dommages structurels, déversant d’énormes quantités de déchets animaux dans les eaux de crue. Le ministère de l’Agriculture de l’État a annoncé la perte de 4,1 millions de volailles et d’au moins 5 500 porcs.
En raison de la destruction causée par la tempête et du manque de préparation des patrons, un nombre inconnu de travailleurs sont toujours sans emploi dans les Carolines.
La tempête a inondé les cendres de charbon de deux centrales appartenant à Duke Energy et répandu dans les rivières voisines des millions de gallons de déchets toxiques, contenant notamment de l’arsenic, du plomb et d’autres métaux lourds.
Le manque d’eau potable pour cuisiner, se laver, faire la lessive et d’autres tâches ménagères est un problème récurrent.
« Sortez dans 24 heures »
Avant de quitter Wilmington, Samantha Worrell et Rebecca Stutts voulaient que nous visitions les appartements du New Providence Park, parce qu’elles avaient entendu dire que des locataires y étaient expulsés. Lorsque nous sommes arrivés dans le complexe, nous avons vu des dizaines de camions de location et des groupes de gens qui s’entraidaient pour charger des meubles et d’autres effets personnels.
« Je veux vous raconter ce qui s’est réellement passé ici et je veux que vous me citiez, » nous a dit Benjamin Houghton, âgé de 23 ans. Le 26 septembre, les propriétaires sont venus et ont mis des avis aux portes des gens pour nous informer que nous devions sortir dans les 24 heures ! Ils ne nous ont pas appelés ou envoyé un courriel, ils n’ont même pas frappé à la porte ! Ils ont prétendu que les dégâts causés par la pluie nécessitaient la destruction et la reconstruction de ces bâtiments. Quand nous avons protesté, ils ont dit que nous avions jusqu’à samedi pour sortir.
« Ma copine et moi sommes chanceux, nous avons trouvé un autre appartement, a-t-il poursuivi. Mais certains de mes voisins sont âgés et vivent seuls. J’ai essayé de les aider à faire leurs bagages et à trouver un endroit où aller. »
Plus tard dans l’après-midi, nous avons visité un petit parc de maisons mobiles à Burgaw où vivent de nombreux travailleurs agricoles. « Nous sommes allés à Chapel Hill pendant une semaine, a dit Alejandra Hernandez, âgée de 25 ans. Nous étions 25 à nous entasser dans quelques chambres d’hôtel. »
Les quelque 150 000 travailleurs agricoles de la Caroline du Nord doivent souvent se débrouiller tout seuls à l’approche des tempêtes. Beaucoup vivent dans des logements insalubres à côté de champs situés dans des plaines inondables.
Un groupe de plus de 35 travailleurs agricoles de la Riggs Brothers Farm à Kinston, qui sont ici avec des visas temporaires H-2A, ont appelé le 911 le 15 septembre pour être secourus. Ils se sont réveillés pour découvrir que l’eau dans leur logement leur arrivait à la taille. Personne n’est venu pendant des heures.
La plupart des travailleurs ont déclaré à la presse qu’ils avaient entendu dire qu’un ouragan allait arriver, mais ils n’en avaient jamais vu un et ne savaient pas à quoi s’attendre. Les avis concernant la tempête n’ont pas été diffusés en espagnol.
Les travailleurs ont appris plus tard que le propriétaire de la ferme avait appelé les autorités pour annuler leur appel à l’aide. Il a refusé de dire pourquoi.
À Clinton, au nord-ouest de Wilmington, des centaines de travailleurs agricoles ont été transportés par autobus vers des abris dans la région dans l’attente d’un feu vert pour retourner travailler. « Nous venons d’arriver et nous avons travaillé quatre jours, a soutenu Celestino Lara Romero, originaire du Mexique, au journal Citizen Times d’Ashville. Nous nous demandons comment nous allons être payés. »
Sam Manuel a contribué à cet article.