Les patrons du rail prescrivent de réduire les équipages, d’allonger les rames, et risquent ainsi des vies pour augmenter leurs profits

Joe Swanson
le 7 janvier 2019

La compétition féroce pour des profits plus élevés conduit les patrons du rail à mettre en danger la vie des travailleurs du rail et des personnes qui vivent dans les communautés à proximité des rails. Ils menacent ainsi de polluer l’air, le sol et l’eau dont se servent des millions de personnes.

Au moins 22 travailleurs du rail sont morts au travail cette année en Amérique du Nord. Huit sont morts au Canada depuis que trois travailleurs ont été tués en avril 2017 quand un train forestier de la compagnie Englewood Railway a déraillé et s’est renversé sur les véhicules de chantiers sur lesquels ils se trouvaient. La mort la plus récente est celle de Pierre-Luc Lévesque, un travailleur en apprentissage âgé de 33 ans, du Canadien National, survenue le 4 décembre à Edmundston au Nouveau-Brunswick.

Le nombre de morts a augmenté fortement au Canada au cours des dernières années. Les travailleurs du rail y ont fait une grève en mai contre la Canadien Pacific, afin de protester contre les journées de travail longues et épuisantes qui mettent en péril la sécurité.

« Depuis quelques années, les compagnies ferroviaires font rouler des méga-trains, qui comptent jusqu’à 250 wagons et sept ou huit locomotives. Cela représente un vrai danger, » a dit au Militant  Lance Anton, un conducteur de train âgé de 41 ans, membre du syndicat SMART à Lincoln, au Nebraska. « Les patrons du rail font cela pour réduire les équipages mais le syndicat devrait combattre de telles conditions de travail dans l’intérêt des travailleurs et des personnes qui habitent à proximité des rails. »

Les patrons ont réussi à imposer des trains avec une seule personne à bord à certains endroits et dans certains ateliers. Une tentative de la compagnie BNSF Railways d’imposer un équipage d’une seule personne a été mise en échec en 2014. Les membres du syndicat SMART ont mené campagne contre le projet de convention collective qui aurait autorisé de tels équipages et l’ont rejeté.

L’une des conséquences des équipages réduits est que les nouveaux employés ne commencent pas à travailler comme serre-freins ou comme aiguilleur pendant quelques années avant d’être affectés comme conducteur qui ont la responsabilité de commander le mouvement des trains. « Les nouvelles recrues reçoivent une formation de 12 semaines seulement. Bien que le syndicat ait un mot à dire sur la formation, c’est loin d’être suffisant, a soutenu Lance Anton. Il faut deux ou trois ans pour se familiariser avec les grands dépôts ferroviaires. »

Les patrons de CSX Transportation ont réduit le temps que passent les nouveaux employés à leur école de chemin de fer de six à trois semaines.  Ils ont également réduit le temps de formation professionnelle dans certains cas. Au cours des six derniers mois, les patrons de CSX et de Norfolk Southern ont imposé de nouvelles règles qui qui obligeront les travailleurs à manœuvrer des wagons-citernes avec une seule barre d’appui verticale tout en faisant une poussée, malgré les dangers avérés de le faire.

Les mesures de réduction des coûts qui alourdissent la charge de travail et exposent les équipages à de plus grands dangers ont aidé CSX à générer des profités plus élevés pour leurs actionnaires. Ils ont cherché à obtenir le soutien des travailleurs pour ces changements en rendant disponibles des actions à taux réduits et en soudoyant avec des bonus entachés de sang les conducteurs qui aideront les patrons à atteindre leurs objectifs de profit.

Train de minerai de fer en détresse en Australie

Le 5 novembre, un train de marchandises BHP entièrement chargé de 268 voitures, transportant du minerai de fer dans la région de Pilbara, dans l’ouest de l’Australie, a parcouru 92 kilomètres sans personne aux commandes, quand le seul travailleur à bord est descendu du train pour inspecter une voiture. Le train a atteint une vitesse de 180 km/h.

Des opérateurs situés à près de 1 800 km ont pu faire dérailler le train à distance dans une zone désertique. Des rails tordus et des wagons détruits, dispersés dans le minerai de fer déversé, ont interrompu les opérations ferroviaires pendant au moins une semaine.

Les patrons continuent pourtant de pousser non seulement pour des équipages d’une seule personne, mais aussi pour des trains sans conducteur. Fin novembre, les trois quarts des trains de minerai de fer exploités par Rio Tinto PLC dans la région de Pilbara étaient sans conducteur. Les patrons du rail aux États-Unis envisagent également de lancer des trains sans équipage.