Portant de sérieux coups aux libertés constitutionnelles, le président Joseph Biden utilise son département de la Justice afin d’intensifier l’offensive des démocrates pour détruire l’ancien président Donald Trump. Pour la première fois, un président en exercice, qui est également candidat à la présidence, utilise sa fonction pour tenter d’inculper son principal rival dans la course à la Maison-Blanche et de le jeter en prison.
La pénalisation des divergences politiques est dangereuse pour les travailleurs. La défense des libertés protégées par la Constitution et la lutte contre la campagne des dirigeants américains pour redorer le blason du FBI sont au cœur de la lutte des classes aujourd’hui.
Trump a été inculpé de 37 chefs d’accusation dans l’espoir qu’au moins l’un d’entre eux sera retenu. Trente et un de ces chefs d’accusation relèvent de la fameuse Loi sur l’espionnage, une loi de chasse aux sorcières utilisée pendant des décennies contre des travailleurs militants, des opposants à la guerre impérialiste, le Parti socialiste des travailleurs et d’autres.
L’ancien président et son assistant, Waltine Nauta, ont été inculpés de six autres chefs d’accusation, y compris en vertu de la loi interdisant de « conspirer » pour entraver la justice. C’est une loi de contrôle de la pensée. L’inculpation a été prononcée le 8 juin par un grand jury fédéral sous la direction du procureur spécial Jack Smith.
Trump a plaidé non coupable le 13 juin.
Selon les procureurs, le « crime » de Donald Trump est d’avoir conservé sans autorisation des « informations concernant les capacités de défense et d’armement des États-Unis et de pays étrangers » et concernant les programmes nucléaires et les plans militaires des États-Unis. Selon l’acte d’accusation, il aurait divulgué certaines de ces informations à d’autres personnes, ce qui aurait « mis en péril la sécurité nationale des États-Unis ».
« Le gouvernement a utilisé la “sécurité nationale” comme forme clé de diffamation politique dans toutes les chasses aux sorcières », a dit au Militant Joanne Kuniansky, candidate du Parti socialiste des travailleurs au Sénat de l’État du New Jersey. « Les travailleurs et nos syndicats devraient exiger que les accusations contre Trump soient abandonnées.
« Les travailleurs impliqués dans des grèves, a-t-elle ajouté, savent que les patrons utilisent les tribunaux et leur gouvernement pour attaquer nos luttes en restreignant les droits des syndicats. La décision prise l’année dernière par Joseph Biden et un Congrès bipartisan d’interdire aux travailleurs du rail de faire grève n’est que le plus récent exemple. »
L’acte d’accusation omet ostensiblement de mentionner la loi sur les archives présidentielles, qui permet aux présidents de conserver des documents gouvernementaux, classifiés ou non, accumulés au cours de leur mandat. Nombreux sont ceux qui l’ont fait, allant parfois jusqu’à exposer certains de ces documents dans des musées construits par eux pour vanter les mérites de leur présidence.
Il y a une longue liste de procureurs qui ont refusé d’engager des poursuites dans bon nombre de violations antérieures des règles gouvernementales concernant le traitement de documents secrets. En 2016, Barack Obama a choisi de ne pas poursuivre la candidate démocrate à la présidence, Hillary Clinton, pour avoir conservé des tas de documents classifiés parmi des milliers de courriels sur son serveur personnel et pour avoir ensuite détruit nombre d’entre eux afin de dissimuler ses agissements. « Aucun procureur raisonnable », a soutenu James Comey, le patron du FBI, « n’engagerait de telles poursuites. »
Biden lui-même fait l’objet d’une enquête pour avoir conservé des documents du temps où il était vice-président dans de nombreux endroits, notamment à côté de sa Corvette dans le garage de sa maison de Wilmington, au Delaware. Personne ne s’attend à ce qu’il soit inculpé.
Pour tenter de dissimuler le fait que les poursuites engagées contre Trump visent à truquer une élection, Joseph Biden a ordonné à sa campagne de réélection et au Comité national démocrate de ne pas dire un mot de l’acte d’accusation. Apparemment, l’épouse de Biden, Jill, n’a pas reçu le mémo. Elle a déclaré aux médias qu’il était « choquant » que 61 % des électeurs républicains disent qu’ils continueront à voter pour Trump malgré l’inculpation.
Les attaques du gouvernement contre Trump et nos droits politiques reflètent leur haine de classe envers les travailleurs, que Clinton a qualifiés de « déplorables ». Biden a contribué à ouvrir la voie aux poursuites en septembre dernier lorsqu’il a qualifié des dizaines de millions de soi-disant républicains MAGA [Make America Great Again] de « semi-fascistes » qui menacent « le fondement même de notre république ».
« Les travailleurs qui ont une conscience de classe, les syndicats et les organisations d’opprimés et d’exploités doivent s’opposer inconditionnellement aux attaques anticonstitutionnelles du gouvernement », explique la résolution politique du SWP de 2022 reproduite dans Le creux de la résistance ouvrière est derrière nous : le Parti socialiste des travailleurs regarde vers l’avant, par les dirigeants du parti Jack Barnes, Mary-Alice Waters et Steve Clark.
La résolution ajoute : « Comme Léon Trotsky nous l’a fortement rappelé en 1939 : “Dans le cadre d’un régime bourgeois, toutes suppressions des droits et libertés politiques, peu importe contre qui elles sont dirigées au début, finissent inévitablement par s’abattre sur la classe ouvrière, en particulier sur ses éléments les plus avancés. C’est une loi de l’histoire.” »
Chasse aux sorcières et Loi sur l’espionnage
La Loi sur l’espionnage de 1917, utilisée pour inculper Donald Trump, a été adoptée pendant la première guerre mondiale impérialiste pour réduire au silence les opposants à l’entrée des dirigeants capitalistes dans ce conflit pour les marchés et le pouvoir. La première personne condamnée a été Charles Schenck, un membre du Parti socialiste. Son « crime » était d’avoir envoyé des tracts contre la conscription.
En confirmant la condamnation de Charles Schenk, la Cour suprême des États-Unis a créé un précédent funeste, utilisé à maintes reprises depuis lors pour justifier des attaques contre le premier amendement. Le juge Oliver Wendell Holmes a dit qu’« un homme qui crie faussement au feu dans un théâtre et provoque la panique » n’a pas droit à la liberté d’expression ».
Les procureurs piétinent d’autres protections constitutionnelles. Jack Smith a obtenu d’un juge qu’il oblige l’avocat de Trump, Evan Corcoran, à se présenter devant le grand jury. Il s’agit là d’une grave violation du droit d’un inculpé au secret professionnel garanti par le sixième amendement.
Selon l’acte d’accusation, Evan Corcoran aurait déclaré au grand jury que l’ancien président lui aurait laissé entendre que l’avocat pourrait retirer des documents susceptibles de nuire à Trump avant de remettre le reste au gouvernement. Cette information est utilisée pour étayer l’affirmation du gouvernement selon laquelle Donald Trump aurait conspiré pour faire obstruction à la justice. Comme toutes les allégations de complot, celle-ci ne s’appuie sur aucun acte illégal réel. Il est particulièrement difficile de se défendre contre de telles accusations.
À la demande du gouvernement, le magistrat américain Bruce Reinhart a décidé le 19 juin d’interdire à Trump de divulguer publiquement les preuves retenues contre lui ou d’en discuter. L’ordonnance a également limité l’accès de Trump aux preuves et lui interdit d’en faire des copies.
Donald Trump fait face à un autre défi : trouver les meilleurs avocats pour se défendre. Pour pénaliser Trump, les démocrates font preuve d’hystérie d’une telle férocité que tout avocat qui envisagerait de le représenter doit être conscient que cela pourrait avoir des conséquences sur sa carrière et bien plus encore.
« Il existe un groupe malicieux qui se fait appeler le Projet 65 et qui cherche à intimider les avocats pour qu’ils ne représentent pas Trump ou toute personne associée à lui », a écrit Alan Dershowitz, avocat spécialisé dans les libertés civiles, le 15 juin. « Ils ont menacé de porter plainte contre de tels avocats. »
Tout cela fait partie intégrante du système de « justice » capitaliste, utilisé par Biden et son parti dans leur chasse aux sorcières politique.
« Au cours de deux siècles et demi de lutte, les travailleurs ont conquis des protections cruciales contre les attaques de l’État capitaliste, a expliqué Joanne Kuniansky. Ces libertés politiques sont nécessaires et utilisées par les travailleurs chaque fois qu’ils construisent des syndicats, qu’ils luttent pour des emplois, les salaires et les soins de santé, qu’ils exigent la fin des guerres des dirigeants américains ou qu’ils s’organisent pour lutter contre l’injustice gouvernementale. »