Quelle est la voie à suivre pour les travailleurs du Moyen-Orient ?

Seth Galinsky
le 11 septembre 2023

Les pourparlers en vue d’un accord diplomatique entre les dirigeants d’Israël et d’Arabie saoudite se déroulent au moment même où les tensions au Moyen-Orient augmentent et où se préparent de nouvelles guerres. Ces conflits surviennent dans un contexte d’effritement de l’ancien ordre mondial impérialiste et de changements d’alliances, accélérés par l’invasion de l’Ukraine par Moscou, alors que des régimes rivaux se disputent les marchés, les matières premières et l’influence politique.

Le conseiller à la sécurité nationale du président Joseph Biden, Jake Sullivan, a rencontré le prince héritier saoudien Mohammed bin Salman à Djeddah, en Arabie saoudite, à la fin du mois de juillet, afin de faire avancer les négociations visant à établir des relations diplomatiques entre les gouvernements saoudien et israélien.

Dans le cadre de cet accord, la monarchie capitaliste sunnite d’Arabie saoudite souhaite obtenir l’aide de Washington pour développer l’énergie nucléaire, ce qui pourrait également conduire à développer des armes nucléaires, pour acquérir des armes de pointe et afin d’obtenir un engagement plus fort de l’armée américaine pour contrer les menaces de Téhéran, rapporte le Wall Street Journal.

Alors que l’impérialisme américain reste la force militaire la plus puissante à intervenir au Moyen-Orient, les États-Unis ont réduit leurs achats de pétrole saoudien, tandis que le Japon, la France et la Chine les ont augmentés. La monarchie saoudienne cherche à établir des relations à plus long terme avec Beijing, qui est aujourd’hui son principal partenaire commercial, avec quelque 100 milliards de dollars par an.

Ces dernières mesures interviennent cinq mois seulement après que les gouvernements iranien et saoudien ont rétabli des relations diplomatiques avec l’aide de Beijing, ce qui a permis une accalmie fragile dans leur antagonisme qui dure depuis plusieurs décennies.

Netanyahou veut un accord avec les Saoudiens

Les libéraux, tant en Israël qu’aux États-Unis, affirment que le gouvernement de coalition du premier ministre Benjamin Netanyahou est « le plus à droite de l’histoire d’Israël » et qu’il a pour objectif d’annexer la Cisjordanie palestinienne. Mais Netanyahou n’est pas prêt à laisser la minorité des partis les plus extrémistes de sa coalition saboter un accord potentiel avec les dirigeants saoudiens, ni à les laisser prendre des mesures qui finiraient par renforcer les ambitions du Hamas, du Djihad islamique et de leurs bailleurs de fonds à Téhéran. Le 14 août, la police israélienne a évacué de force des colons israéliens de l’avant-poste « illégal » d’Aira Shahar, en Cisjordanie palestinienne.

Netanyahou a affirmé qu’il n’y avait « aucun obstacle politique » à faire des concessions à l’Autorité palestinienne, qui gouverne de vastes parties de la Cisjordanie, si cela pouvait contribuer à conclure un accord avec Riyad. 

Bien qu’un accord rapide entre les deux gouvernements soit peu probable, les pourparlers s’appuient sur les accords d’Abraham de 2020, négociés par l’administration de Donald Trump, qui ont établi des relations diplomatiques et commerciales entre le gouvernement israélien et les gouvernements de Bahreïn, des Émirats arabes unis, du Maroc et du Soudan.

Avec ou sans accord officiel, les gouvernements saoudien et israélien développent leurs relations. Début août, la société israélienne SolarEdge et le conglomérat saoudien Ajlan & Bros Holding ont annoncé la création d’une entreprise commune pour le développement de l’énergie solaire en Arabie saoudite. 

Depuis son entrée en fonction, l’administration Biden n’a rien fait pour rallier davantage de gouvernements arabes ou musulmans aux accords.

Quels que soient les objectifs des dirigeants capitalistes et des politiciens qui y participent, les accords d’Abraham et les relations commerciales qui en découlent permettent aux travailleurs de toutes religions et de tous groupes ethniques de se rencontrer et de travailler ensemble. 

Cela crée de meilleures conditions pour agir ensemble en défense des intérêts des classes laborieuses.

De plus, mettre fin au boycottage d’Israël par les régimes arabes renforce Israël en tant que refuge pour les Juifs face à la montée mondiale de l’antisémitisme. 

Tout cela ne plaît point au régime clérical bourgeois chiite en Iran. Pour se maintenir au pouvoir, il se doit d’étendre son influence contrerévolutionnaire partout dans la région, en particulier en Irak, en Syrie et au Liban. Téhéran ne cache pas son objectif de rayer Israël de la carte. 

Au début du mois d’août, le Pentagone a envoyé dans le golfe d’Oman 3 000 membres de la Marine supplémentaires, dont des marines, soutenus par le navire de guerre USS Bataan et des avions de chasse F-35, en réponse à ce qu’il dit être le harcèlement accru des pétroliers et autres navires par les forces iraniennes. 

Au début d’août, le New York Times  a rapporté que l’administration de Joe Biden avait accepté de débloquer 6 milliards de dollars de fonds gouvernementaux iraniens en échange de la libération par le régime de cinq citoyens américains emprisonnés. Le peuple iranien continue de souffrir des conséquences des sanctions américaines contre l’Iran, même si le régime a réussi à contourner certaines d’entre elles. 

Le 21 août, le New York Sun  a rapporté que le régime iranien avait réussi à augmenter ses exportations de pétrole de 300 000 barils par jour au plus fort des sanctions de Washington sous l’administration de Donald Trump à environ 2,2 millions de barils aujourd’hui. Ceux-ci sont vendus principalement à Beijing. 

Téhéran : faire de Jénine une petite Gaza

Téhéran aide les forces islamistes réactionnaires de toute la région. Cela comprend le Hamas, qui gouverne Gaza d’une main de fer, et le Hezbollah au Liban. Il a également créé des milices en Irak et en Syrie qui mènent de plus en plus d’attaques visant Israël.

Téhéran a récemment envoyé de la dynamite et d’autres armes à ses alliés en Cisjordanie, parfois à l’aide de drones, en espérant profiter de la désillusion généralisée à l’égard de l’Autorité palestinienne et transformer au moins la ville de Jénine, où le Hamas et le Jihad islamique sont les plus forts, en une petite Gaza comme base pour attaquer Israël. 

Parallèlement, le Hamas a pour l’instant respecté sa trêve de facto à Gaza avec les autorités israéliennes, même s’il se vante de son rôle dans la multiplication des attaques terroristes lancées à partir de Jénine contre des civils juifs non armés en Cisjordanie et en Israël. Le régime israélien a octroyé des permis à 20 000 habitants de Gaza pour qu’ils puissent travailler en Israël. 

Cependant, cela pourrait changer à tout moment et le peuple israélien pourrait se retrouver dans une guerre sur de multiples fronts initiée par Téhéran avec des forces de Gaza, du Liban et de Syrie. 

Dans la lutte pour empêcher qu’une telle possibilité ne devienne réalité, les travailleurs des territoires palestiniens, d’Israël et d’ailleurs au Moyen-Orient, tout comme les travailleurs du monde entier, doivent forger des partis révolutionnaires de masse. Ces partis uniraient les travailleurs d’origines nationales et de religions différentes dans le but de défendre nos intérêts de classe communs. Ils mèneraient la bataille pour créer un État palestinien indépendant à côté d’Israël, pour mettre fin à la violence et à l’oppression dans toute la région et pour débarrasser le monde des persécutions et des attaques antisémites, sur la voie permettant de prendre le pouvoir des mains de la classe capitaliste et d’effectuer une révolution socialiste.