MONTRÉAL – Dans un acte flagrant de censure visant à imposer des normes « woke » et à « annuler la culture », la Commission scolaire du district de Peel, à l’ouest de Toronto, a fait retirer des milliers de livres de ses 257 bibliothèques scolaires, en visant tout particulièrement les ouvrages publiés avant 2008.
Elle a agi en réponse à une directive du ministre de l’Éducation de l’Ontario visant à mettre en œuvre un « processus fondé sur l’équité pour éliminer des livres ». Parmi les livres retirés figurent Le journal d’Anne Frank et l’ensemble de la série Harry Potter de J. K. Rowling.
De nombreux livres ont été jetés dans des dépotoirs, pour garantir qu’ils ne puissent être utilisés par personne d’autre, a confirmé la commission scolaire, car ils sont « intrinsèquement racistes, ils reflètent des préjugés de classe ou des préjugés favorables aux hétérosexuels et/ou ils sont sexistes » et par conséquent « ils perpétuent le mal et l’oppression ». Cela inclut de nombreux livres considérés comme des classiques, car ils « sont généralement des textes centrés sur l’Europe » qui renforcent les « idéologies coloniales » et qui ne sont « pas inclusifs, culturellement adaptés, pertinents ou justes ».
« Aucune société qui détruit des livres ne s’est retrouvée du bon côté de l’histoire ! » a averti « Des bibliothèques pas des dépotoirs », un groupe de parents, de grands-parents et d’autres membres de la communauté constitué pour lutter contre l’interdiction de livres.
Une photo d’étagères à moitié vides prise au début de la nouvelle année scolaire par Reina Takata, une élève de 10e année indignée, a été largement reproduite dans les articles de presse sur la purge. Takata estime que plus de 50 % des livres de la bibliothèque de son école ont disparu. « Les auteurs qui ont écrit sur les camps d’internement japonais seront retirés des étagères et des événements entiers d’une grande importance historique pour les Canadiens d’origine japonaise seront supprimés », a soutenu Reina Takata, qui est d’origine japonaise. « Cela m’inquiète beaucoup. »
En réponse à l’indignation publique, le ministre de l’Éducation de l’Ontario, Stephen Lecce, a dit au Toronto Sun que la Commission scolaire du district de Peel avait mal interprété la directive du ministère et qu’il était « offensant » de retirer des livres des années passées « qui permettent aux élèves de mieux connaître le Canada, son histoire, l’antisémitisme ou les classiques littéraires célèbres ». Il a demandé à la commission scolaire de suspendre la proscription de livre.
Une commission scolaire de Toronto bannit Shakespeare
Mais ce n’est pas la première fois qu’un district scolaire met en œuvre la ligne libérale de « culture de l’annulation » du ministère de l’Éducation. En février, la Commission scolaire du district de Toronto a voté par 18 voix contre 3 pour annuler le cours d’anglais de 11e année, qui porte sur Shakespeare, Charles Dickens et d’autres classiques. Elle l’a remplacé par un cours sur les œuvres d’écrivains autochtones canadiens. D’autres commissions scolaires de l’Ontario ont pris des mesures similaires.
Réfutant les arguments de la commission scolaire, qui affirme que ces mesures « reflètent l’intérêt et l’engagement des élèves », l’étudiant Daniel Manandhar a écrit un article d’opinion dans le National Post pour dénoncer le changement. L’enseignement de l’histoire et des préoccupations des Autochtones « est important, mais ce nouveau programme réduira l’enseignement des classiques anglais, a-t-il écrit. C’est précisément parce que les classiques ont du contenu qu’ils offensent parfois : ils défendent quelque chose. »
En 2019, la Commission scolaire catholique Providence, dans le sud-ouest de l’Ontario, a retiré plus de 4 700 livres de 30 bibliothèques scolaires, affirmant qu’ils avaient « un contenu dépassé et qu’ils véhiculent des stéréotypes négatifs à propos des Premières Nations, des Métis et des Inuits » ou qu’ils reflètent une « appropriation culturelle ». Trente livres ont été brûlés lors d’un rituel de « purification par la flamme » et les cendres du « racisme, de la discrimination et des stéréotypes » ont servi d’engrais pour planter un arbre. L’événement s’intitulait : « Redonner à notre mère la Terre ».
Des campagnes similaires sont en cours aux États-Unis et ailleurs.
« Les écoles et les universités sont devenues des foyers de censure, où on prétend garantir des “espaces sûrs” aux jeunes et les “protéger” contre des mots, des idées, des faits ou des œuvres artistiques que les sages considèrent littéralement “blessants” ou “offensants” pour les jeunes », a souligné Mary-Alice Waters, dirigeante du Parti socialiste des travailleurs aux États-Unis, dans Le travail, la nature et l’évolution de l’humanité : une vision longue de l’histoire, publié par les éditions Pathfinder. « On enseigne aujourd’hui aux étudiants que les grandes œuvres d’art, la littérature et les conquêtes scientifiques des générations passées, desquelles nous apprenons et que nous transformons aujourd’hui à mesure que nous les utilisons pour avancer, sont au mieux sans importance ou ne sont que des produits de la “suprématie blanche”, de la “masculinité toxique”, de la “transphobie” et de la “misogynie”. »
Au lieu de cela, ce qu’il faut, c’est encourager « les étudiants à élargir leurs horizons historiques et culturels, à “élargir votre vision”, comme Malcolm X exhortait les travailleurs et les jeunes à le faire ».