Les élections au Canada reflètent la crise de la classe dirigeante capitaliste

Joe Young
le 25 novembre 2019
Militant/Beverly BernardoLe candidat de la Ligue communiste aux élections fédérales, Pierre-Luc Filion, discute de l'article « L'intendance de la nature incombe aussi à la classe ouvrière : en défense de la terre et du travail » dans Nouvelle Internationale no 9 avec des manifestants à Montréal lors du rassemblement contre le « changement climatique » du 27 septembre.

MONTRÉAL — « Les résultats des élections fédérales canadiennes du 21 octobre ont aggravé la crise des dirigeants capitalistes canadiens, » a expliqué Steve Penner lors du Forum ouvrier du Militant, organisé ici le 2 novembre. « Cela les placent dans une position encore plus faible pour mettre en œuvre des politiques qui puissent résoudre leurs profonds problèmes. »

Steve Penner était l’un des deux candidats de la Ligue communiste dans la région de Montréal. Il était candidat dans la circonscription de Papineau et Pierre-Luc Filion, dans celle de Longueuil-St-Hubert.

Le Parti libéral du premier ministre Justin Trudeau reste au gouvernement, mais a perdu sa majorité parlementaire. Il a obtenu moins de voix que n’importe quel parti au pouvoir dans l’histoire du Canada. Il a obtenu moins de voix que le Parti conservateur, le parti de l’opposition, mais a obtenu plus de sièges. Les libéraux ne peuvent adopter de loi sans obtenir le vote d’au moins un des autres partis, les conservateurs, le Bloc québécois ou le Nouveau parti démocratique.

La crise du capitalisme est enracinée dans la courbe descendante du capitalisme mondial qui a débuté au milieu des années 1970 et qui découle de la chute du taux de profit des corporations capitalistes, a dit Steve Penner. Cela a amplifié les rivalités entre les puissances capitalistes mondiales qui tentent toutes de renforcer leur propre position.

« Les familles dirigeantes du Canada sont beaucoup plus faibles que celles des plus grands pays capitalistes du monde, a expliqué Steve Penner. Elles ne peuvent rien faire d’autre que de s’accrocher aux basques des capitalistes des États-Unis et soutenir leur politique étrangère impérialiste, du Moyen-Orient à Cuba et au Venezuela, dans l’espoir que Washington les récompensera.

« Le fait que Donald Trump ait pu déchirer unilatéralement l’Accord de libre-échange nord-américain avec le Canada et le Mexique et imposer un nouveau pacte commercial aux deux pays montre que cette « stratégie » d’Ottawa lui procure très peu de résultats, » a dit Steve Penner. Ni Ottawa ni Washington n’ont encore approuvé le nouveau pacte.

« Les dirigeants canadiens ont aussi besoin d’un gouvernement central fort pour freiner la résistance de la classe ouvrière, qui menacera inévitablement leur pouvoir à mesure que la crise capitaliste s’approfondira, a soutenu Steve Penner. Mais un gouvernement fédéral fort, c’est exactement ce qu’ils n’ont pas. »

Lors d’élections précédentes, les partis libéral et conservateur ont obtenu des voix dans l’ensemble du pays. Mais cette fois-ci, l’Est a largement favorisé les libéraux, tant que l’Ouest s’est tourné principalement vers les conservateurs. Ces derniers ont obtenu tous les 48 sièges de l’Alberta et de la Saskatchewan, sauf un. Selon le New York Times, Trudeau a vu ses appuis fondre dans l’Ouest du Canada, riche en minerais, après avoir imposé des taxes sur l’utilisation des combustibles fossiles et tenter, de manière « moralisante », de « prescrire une nouvelle éthique publique. »

Aurélie McBrearty a demandé à Steve Penner pourquoi la Ligue communiste a été la seule à aborder la question de l’accès à l’avortement pendant la campagne.

Steve Penner a expliqué que les partis à la gauche de la politique bourgeoise ont monté en épingle le fait que le chef conservateur Andrew Scheer s’oppose personnellement à l’avortement. « Pour ces partis, ce n’était qu’une façon de dissimuler le fait que le véritable problème, c’est le manque d’accès à l’avortement pour des millions de femmes partout au Canada, en particulier dans les zones rurales, les provinces de l’Atlantique et dans le Nord. » Moins d’un hôpital sur cinq offre des services d’avortement au Canada.

Steve Penner a expliqué que les groupes de défense des droits des femmes « suivent une politique de moindre mal visant à faire élire de soi-disant amis des droits des femmes, principalement les libéraux et le NPD.

« Mais ce n’est pas en votant pour les partis bourgeois, mais bien en se mobilisant dans les rues pour décriminaliser l’avortement que des milliers de gens ont pu gagner le droit à l’avortement. » Les syndicats doivent lutter pour le droit des femmes de choisir l’avortement, a-t-il dit.

Les travailleurs ont besoin de leur propre parti

« Les travailleurs doivent rompre avec la politique de moindre mal que promeuvent également les dirigeants syndicaux. Ils doivent se battre indépendamment des partis des patrons et construire un parti ouvrier de combat.

« C’est la question brûlante à laquelle sont confrontés les travailleurs de la Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada qui ont voté à plus de 99 pour cent en faveur de la grève, » a affirmé Steve Penner. Ils sont sans contrat depuis le mois de juillet. Mais les dirigeants syndicaux des chemins de fer ont reporté la grève jusqu’après les élections. Ils ont plutôt soutenu la campagne « N’importe qui sauf Scheer » de la bureaucratie syndicale. Ils cherchent maintenant à travailler avec les libéraux dans leurs efforts pour « faire fonctionner le gouvernement minoritaire. »

« Mais c’est un gouvernement capitaliste, a souligné Steve Penner. Il n’agira que dans l’intérêt de la poignée de familles riches. Il sert leurs intérêts et non ceux des travailleurs. »

Plus tôt dans la journée, Katy LeRougetel, membre de la Ligue communiste, avait fait campagne à Toronto où elle s’était entretenue avec Rudolph Terrelange, un mécanicien à la retraite. Celui-ci a dit qu’il avait voté pour les libéraux parce que, lorsque le premier ministre Justin Trudeau est intervenu pour faire cesser les poursuites contre des patrons de SNC-Lavalin accusés d’offrir des pots de vin, il a dit qu’il « protégeait les travailleurs en s’assurant qu’ils ne seraient pas sans emploi. »

Katy LeRougetel a répondu : « Il essayait juste de nous tromper. Justin Trudeau défend les grandes entreprises et non les travailleurs. Nous avons besoin de notre propre parti, un parti ouvrier qui se bat pour renverser le régime capitaliste et établir un gouvernement qui agira dans l’intérêt des travailleurs. »

Steve Penner a conclu la discussion au forum en disant : « La Ligue communiste construit un parti qui participe à toutes les luttes des opprimés et des exploités pour faire avancer une stratégie révolutionnaire, la seule marche à suivre pour réaliser des gains durables. » Pendant la campagne électorale, les candidats de la Ligue communiste se sont joints à une ligne de piquetage des métallos en grève, un rassemblement contre l’attaque d’Ankara contre les Kurdes en Syrie et une manifestation contre la loi 21 du Québec qui interdit aux enseignants et à d’autres travailleurs du secteur public de porter des symboles religieux.

Steve Penner a invité les participants au forum à se joindre à la Ligue dans ses activités et à adhérer au parti. « Il n’y a rien de mieux que vous puissiez faire de votre vie. »