La course au profit des patrons est au cœur de la catastrophe capitaliste au Texas

Alyson Kennedy
le 8 mars 2021
Dans un geste de solidarité de classe, Jessica Villa Gomez, propriétaire de Boombox Taco, a donné des milliers de tacos à des travailleurs de Houston privés d’électricité depuis plusieurs jours.
BOOMBOX TACODans un geste de solidarité de classe, Jessica Villa Gomez, propriétaire de Boombox Taco, a donné des milliers de tacos à des travailleurs de Houston privés d’électricité depuis plusieurs jours.

DALLAS — Une grande tempête hivernale inhabituelle a commencé, le 12 février, à répandre de grandes quantités de neige et de verglas ici, à travers le Texas, dans d’autres parties du Sud et du Midwest et dans le nord du Mexique. La neige a recouvert 80 pour cent du Texas, de Dallas à Brownsville sur la frontière sud.

Quelque 25 millions de personnes au Texas, en Oklahoma, en Arkansas, en Louisiane et au Mississippi ont fait face à un avertissement de gel rigoureux pendant toute la semaine suivante.

La tempête a produit un désastre ici et à travers le Texas. « La cause de la catastrophe sociale à laquelle sont confrontés les travailleurs et les agriculteurs au Texas et au-delà de cet État n’est pas la tempête », a dit Gerardo Sánchez, candidat du Parti socialiste des travailleurs pour le conseil de ville de Dallas, dans une déclaration le 23 février. « C’est plutôt la loi de la jungle du système capitaliste, qui accorde plus d’importance aux profits de quelques-uns qu’aux besoins humains de millions de personnes.

« Le Parti socialiste des travailleurs affirme que les travailleurs doivent se battre pour le contrôle ouvrier de tous les aspects de la production, des usines et raffineries où nous travaillons jusqu’au contrôle ouvrier au niveau des États et au niveau national. »

Gerardo Sánchez, candidat du Parti socialiste des travailleurs au conseil municipal de Dallas, discute avec Claudia Acosta à Dallas le 25 janvier. Elle lui a dit: « Nous devons nous unir. Nous avons connu des années de mauvaises conditions et de violation de nos droits. » Au lendemain de la tempête hivernale, la catastrophe sociale causée par le fonctionnement du système capitaliste a approfondi la crise pour les travailleurs.
MILITANT ALYSON KENNEDYGerardo Sánchez, candidat du Parti socialiste des travailleurs au conseil municipal de Dallas, discute avec Claudia Acosta à Dallas le 25 janvier. Elle lui a dit: « Nous devons nous unir. Nous avons connu des années de mauvaises conditions et de violation de nos droits. » Au lendemain de la tempête hivernale, la catastrophe sociale causée par le fonctionnement du système capitaliste a approfondi la crise pour les travailleurs.

Les températures ont plongé à moins 7oC le jour et moins 15 la nuit au Texas, un État où les maisons et les commerces ne sont habituellement pas aménagés pour l’hiver. Presque toutes les sources d’énergie de l’État ont été paralysées parce que les compagnies d’électricité locales avaient installé peu de mesures de protection contre des températures sous le point de congélation, car cela aurait réduit leurs profits. Les éoliennes couvertes de glace de l’ouest du Texas ont cessé de fonctionner ; 185 unités de production électrique, dont des centrales électriques au gaz et au charbon, ont cessé de fonctionner ; et une centrale nucléaire dans le sud du Texas est tombée en panne quand sa source d’eau a gelé.

Le Conseil de la fiabilité électrique du Texas (ERCOT), qui gère le système électrique, a commencé à commander des pannes de courant. « Malheureusement », a cyniquement dit à la presse Bill Magness, le chef de la direction d’ERCOT, « ces interruptions ont des conséquences terribles pour les gens quand elles se prolongent. » Le 16 février, plus de quatre millions de personnes étaient sans chauffage ni éclairage, au moment où les températures étaient les plus froides depuis des décennies.

Des milliers de personnes à Killeen, où se trouve Fort Hood, la grande base militaire, ont manqué d’électricité pendant plus d’une semaine. « J’ai trois petits enfants — vous savez, j’ai un bébé — et je ne pouvais absolument pas garder mes enfants dans cette maison plus longtemps », a dit Kayla Holmes à KWTX-TV. Elle a emménagé avec une famille qui avait de l’électricité.

« Certains de mes voisins ont dit qu’ils brûlent leurs tables à manger, leurs chaises, leurs lits » et qu’ils se font des tentes de fortune dans leur maison pour rester au chaud, a-t-elle dit. Plus de 70 personnes sont mortes à l’échelle nationale à cause des températures glaciales, plus de la moitié d’entre elles au Texas. Mais le vrai total ne sera pas connu avant plusieurs semaines.

Les travailleurs doivent maintenant faire face à une nouvelle crise d’eau contaminée, de tuyauterie brisée et de pénurie d’eau. Plus de 14,6 millions de personnes ont reçu un avis d’ébullition d’eau.

Solidarité ouvrière

Les membres du Parti socialiste des travailleurs George Chalmers et Hilda Cuzco ont interviewé leur voisine immédiate, Patricia Madrigal, à Dallas pour le Militant. L’immeuble d’appartements où ils habitent est sans électricité ni eau depuis plus d’une semaine. Patricia Madrigal leur a donné de l’eau par solidarité. Il y a eu plusieurs exemples de gens qui ont ainsi aidé d’autres travailleurs à passer à travers le désastre.

« J’ai des bébés, j’ai appelé et personne n’avait d’eau, a dit Patricia Madrigal. Un ami de mon mari nous a donné de l’eau pour actionner la chasse d’eau, j’ai dû acheter de l’eau propre. Quant à la nourriture, nous avons de la charcuterie et des salades. » Sans eau pour se laver ou cuisiner, de nombreuses personnes doivent recourir aux aliments préparés et à la vaisselle jetable, malgré le coût plus élevé.

Avant que le courant électrique ne soit rétabli, tout le monde devait porter deux chandails la nuit. « J’ai eu une grande frayeur quand j’ai remarqué que la main de ma fille Alondra, âgée de 4 ans, devenait trop froide, gelée, pensais-je, alors nous l’avons enveloppée de couvertures pour la garder au chaud. »

Parce que les compagnies d’électricité au Texas sont autorisées à offrir des tarifs d’électricité qui fluctuent en fonction de la demande, de nombreux travailleurs commencent à recevoir des factures scandaleuses. « Mon oncle a reçu une facture de 14 000 dollars et on lui a dit qu’il devait la payer », a indiqué Patricia Madrigal. De nombreux contrats donnent aux patrons de l’électricité la possibilité de retirer l’argent pour payer ces factures directement de votre compte bancaire.

Il existe trois réseaux électriques aux États-Unis, l’un couvre l’est, l’autre les États de l’ouest, et le réseau du Texas, qui couvre presque tout cet État. Un article du Wall Street Journal  du 19 février, « Le gel au Texas : pourquoi le réseau a flanché », a dit : « Les États-Unis sont de plus en plus dépendants de l’électricité mais n’ont pas de modèle parfait pour gérer le marché de l’électricité au vingt-et-unième siècle. »

C’est parce que leur « modèle » vise à maximiser les profits et non à garantir l’alimentations électrique.

« Nationaliser l’industrie énergétique »

Gerardo Sánchez, le candidat du SWP au conseil municipal de Dallas, a souligné qu’en plus de reconstruire après la catastrophe, « les travailleurs et nos syndicats doivent se battre pour un programme de travaux publics financé par le gouvernement fédéral afin de mettre des millions de personnes au travail à des salaires de niveau syndical, pour réparer des tuyaux cassés, des maisons et des immeubles d’appartements endommagés et remplacer des systèmes d’alimentation et d’autres infrastructures usés au Texas et aux États-Unis.

« Nous ne pouvons pas compter sur les démocrates et les républicains, les deux partis des patrons. Nous avons besoin de notre propre parti, un parti des travailleurs basé sur nos syndicats, afin de mettre de l’avant et diriger la lutte pour la nationalisation de l’industrie énergétique sous le contrôle des travailleurs, a-t-il ajouté. Un tel combat peut inspirer et donner confiance aux travailleurs, en montrant que nous sommes capables de construire un mouvement de millions de personnes qui peut attirer tous ceux qui sont exploités et opprimés par le capital afin de remplacer le régime capitaliste par un gouvernement de travailleurs et d’agriculteurs.

Gerardo Sánchez a rencontré Hector Benegas et sa femme, Patricia Benegas, originaires d’Argentine, en faisant campagne dans un stationnement de Walmart le 21 février. Ils vivent à Dallas depuis plus de 20 ans. Hector a une petite entreprise de camionnage et Patricia dirige une garderie.

« Au début, ma petite entreprise n’avait pas de courant électrique. Il a été restauré hier, a-t-il dit. Heureusement, il n’y a pas eu de problème avec l’eau. » Les affaires ont été difficiles, mais ce n’est pas seulement la météo, « la pandémie a également ralenti les choses », a-t-il conclu.

« Avec le gel, j’ai dû fermer temporairement la garderie faute de services », a dit Patricia Benegas.

« Les dirigeants capitalistes nous mènent dans une impasse car ils ne se soucient pas de savoir si les travailleurs vivent ou meurent dans cette crise », a dit Gerardo Sánchez. Le couple a acquiescé.