Le droit de choisir d’avoir ou non des enfants, y compris combien, doit être une question privée et personnelle pour toutes les femmes. Les femmes ont absolument besoin de pouvoir contrôler et planifier leur propre vie. Pour gagner l’égalité entre les hommes et les femmes, unifier la classe ouvrière et construire nos syndicats, il faut absolument lutter pour ce droit, y compris pour l’accès à des services de planification familiale facilement disponibles et à un contrôle des naissances et un avortement sûrs et sans danger.
Mais après que la Cour suprême des États-Unis a dépénalisé l’avortement en 1973 dans la décision Roe contre Wade, ce droit a été repoussé année après année. Aujourd’hui, 90 pour cent des comtés américains n’ont plus de clinique d’avortement.
La campagne de propagande incessante et l’érosion du droit des femmes à choisir ont affecté la conscience des travailleurs. Même si elles refusent qu’on interdise tous les avortements, des millions de personnes croient que la vie commence dès la conception ou peu après. Cela s’est produit faute de toute réponse du mouvement syndical pour expliquer clairement que le soutien au droit des femmes de choisir concerne l’ensemble de la classe ouvrière. C’est un débat politique au sein de la classe ouvrière qu’il faut mener.
La dernière attaque en date est la loi texane dite du « battement de cœur », qui interdit l’avortement dès qu’une « activité cardiaque » est détectée, généralement après six semaines de grossesse. Elle est entrée en vigueur le 1er septembre. Dans trois mois, la Cour suprême entendra l’appel de l’État du Mississippi contre les décisions de tribunaux inférieurs qui ont jugé inconstitutionnelle sa loi de 2018, qui interdit l’avortement après 15 semaines.
Après la seconde guerre mondiale, un nombre croissant de femmes sont entrées sur le marché du travail et la solidarité entre les hommes et les femmes qui travaillent s’est accrue. Davantage de femmes ont obtenu des emplois dans ce qui était traditionnellement des postes réservés aux hommes.
S’appuyant sur la lutte pour les droits des Noirs, qui a renversé la ségrégation de Jim Crow et a inspiré le mouvement de masse contre la guerre des États-Unis au Vietnam, des milliers de femmes ont commencé à s’organiser pour faire avancer la lutte pour les droits des femmes, y compris le droit de choisir l’avortement.
Mais lorsque la Cour suprême a dépénalisé l’avortement, le débat sur le droit des femmes à disposer de son propre corps n’avait pas été mené à son terme et remporté de manière décisive. Contrairement à la lutte pour les droits des Noirs, qui avait impliqué des millions de personnes pendant plus d’une décennie, le mouvement des femmes ne faisait que commencer.
L’année qui a suivi l’arrêt Roe contre Wade, les dirigeantes des groupes de femmes de la classe moyenne ont affirmé que la bataille avait été gagnée et que toute autre action ne ferait que provoquer la droite.
Une décision imparfaite et prématurée
Non seulement la décision du tribunal était-elle prématurée, mais elle ne se basait pas « sur le droit des femmes « à une protection égale devant la loi », un droit garanti par le quatorzième amendement de la Constitution, mais sur des critères médicaux », a écrit Jack Barnes, secrétaire national du Parti socialiste des travailleurs, dans Le bilan anti-ouvrier des Clintons : Pourquoi Washington craint les travailleurs.
« Pendant les trois premiers mois (le premier « trimestre »), a tranché le tribunal, la décision de mettre un terme à une grossesse « doit être laissée au médecin traitant la femme enceinte » (pas à la femme elle-même, mais à un médecin !).
« En même temps, a ajouté Jack Barnes, le tribunal a permis aux gouvernements des États d’interdire la plupart des avortements après la « viabilité », ce qui se produit inévitablement de plus en plus tôt dans la grossesse avec les progrès de la médecine. »
Les opposants aux droits des femmes tentent de convaincre les travailleurs que l’avortement est un meurtre. C’est pourquoi la loi du Texas s’appelle « rythme cardiaque fœtal », sans fondement scientifique. Un embryon de six semaines n’a rien qui ressemble à un cœur humain.
Lorsque l’avortement était illégal, des centaines de femmes mouraient d’avortements mal faits chaque année aux États-Unis. En 1965, 17 pour cent de tous les décès maternels sont survenus à cause d’avortements mal faits. Ce sont majoritairement des femmes de la classe ouvrière qui ont subi ces conséquences mortelles : elles étaient beaucoup moins en mesure de payer pour des interventions sûres.
Comme les hommes, les femmes doivent avoir le droit de prendre leurs décisions concernant leur propre corps, y compris toutes les décisions médicales. Se battre pour cela est une condition préalable à la pleine émancipation des femmes.
Au lieu d’éduquer et de mobiliser pour gagner une majorité à la défense du droit de choisir, des organisations comme l’Organisation nationale pour les femmes et la Ligue nationale d’action pour le droit à l’avortement exhortent depuis des décennies les femmes à ne pas faire de vagues et à compter sur les responsables du Parti démocrate. Ce cours a mené au désastre.
Ce qu’il faut, c’est de répondre clairement aux arguments utilisés par les opposants aux droits des femmes et de se mobiliser dans la rue pour obtenir une majorité décisive parmi les travailleurs. Nos syndicats devraient être à l’avant-garde de cette lutte.
Sans une lutte pour l’égalité des femmes, la solidarité dont la classe ouvrière a besoin pour combattre les patrons et pour mener une lutte révolutionnaire pour arracher le pouvoir politique des mains de la classe capitaliste est impossible. Sans le droit de décider si et quand avoir un enfant, les femmes ne peuvent pas participer sur un pied d’égalité à la vie économique ou politique.