Les travailleurs se tournent de plus en plus vers leurs syndicats pour lutter contre les attaques des patrons

Terry Evans
le 25 octobre 2021
Des travailleurs de la santé de l’hôpital Mercy de Buffalo, dans l’État de New York, lors de leur douzième journée de grève pour l’embauche d’un nombre sécuritaire d’employés et pour de meilleurs salaires, en particulier pour les travailleurs les moins bien payés.
COMMUNICATIONS WORKERS OF AMERICA DISTRICTDes travailleurs de la santé de l’hôpital Mercy de Buffalo, dans l’État de New York, lors de leur douzième journée de grève pour l’embauche d’un nombre sécuritaire d’employés et pour de meilleurs salaires, en particulier pour les travailleurs les moins bien payés.

Les travailleurs sont de plus en plus nombreux à faire du piquetage et à utiliser leurs syndicats pour résister à l’offensive des patrons. Ces derniers cherchent à renverser des gains réalisés par les travailleurs lors de luttes précédentes et à leur arracher encore plus de concessions au niveau des salaires, des horaires et des conditions de travail. Pour que les travailleurs puissent l’emporter, il faut absolument que nous construisions la solidarité avec chacune de ces luttes. C’est ainsi que nous pourrons commencer à forger un mouvement syndical plus uni et plus combatif.

Les patrons et leurs défenseurs au sein des partis démocrate et républicain sont aux prises avec une crise mondiale du système capitaliste de plus en plus profonde. La concurrence féroce entre les patrons, ici et à l’étranger, s’aiguise. Ils répondent « en réduisant leurs coûts », c’est-à-dire en faisant payer la classe ouvrière.

Les patrons de Kellogg’s « ne nous traitent pas vraiment comme des personnes », a dit Trevor Bidelman, l’un des 1 400 membres du Syndicat International des Travailleurs et Travailleuses de la Boulangerie, Confiserie, Tabac et Meunerie (BCTM) en grève dans les quatre usines de céréales de la société. Des millions de personnes font face à de semblables atteintes à leur dignité au travail. De plus en plus de travailleurs résistent aux attaques contre les syndicats, aux horaires et aux quarts de travail inhumains, aux régimes de salaire à deux ou trois paliers, avec de pires salaires et avantages pour les nouveaux embauchés, aux attaques contre les salaires et la rémunération des heures supplémentaires, et à d’autres concessions qu’exigent les patrons pour diviser les travailleurs et mieux défendre leurs profits.

Le nombre de travailleurs impliqués dans de grandes grèves, qui a baissé pendant quatre décennies, augmente maintenant depuis 2019, rapporte le Bureau des statistiques de l’emploi, qui enregistre les grèves de plus de 1 000 travailleurs. Malgré une forte baisse des grèves au début de la pandémie, les travailleurs de l’industrie de base sont maintenant plus nombreux à se dresser contre les attaques des employeurs et, pour le faire, à se tourner vers nos principales organisations de défense : nos syndicats.

Parallèlement à la lutte des membres du BCTM chez Kellogg’s, il y a des grèves et des luttes contre des lock-out dans les usines, les mines, les raffineries de pétrole et d’autres lieux de travail. Lors des récentes négociations pour le renouvellement de leur convention collective, 60 000 membres de l’Alliance internationale des employés de scène ont voté à 98 pour cent en faveur d’une grève nationale, pour la première fois dans l’histoire du syndicat. Les médias des patrons en prennent note. « Les travailleurs américains réalisent que c’est le moment idéal pour faire la grève », titrait la revue Time le 8 octobre.

Crise de l’emploi, des salaires, de la hausse des prix

Le gouvernement affirme que le chômage a baissé le mois dernier, passant de 5,2 à 4,8 pour cent. Mais ce n’est pas parce que les chômeurs ont trouvé un emploi. Davantage de travailleurs ont « quitté » le marché du travail parce qu’ils ont conclu qu’il ne vaut pas la peine d’accepter les emplois que les patrons offrent à des salaires si bas qu’on peut à peine survivre et dans des conditions misérables.

Les médias se font l’écho des plaintes des patrons, qui ne parviennent pas à embaucher suffisamment de travailleurs, alors qu’il y a 5 millions de travailleurs de moins qu’avant la pandémie. Ils disent que cela entraîne une hausse des salaires. Mais les salaires réels, si l’on tient compte de la hausse des prix, ont diminué depuis mai 2020. Ils ont baissé pour chacun des cinq premiers mois de la présidence de Joseph Biden.

L’indice des dépenses de consommation personnelle, qui n’inclut pas les prix de l’alimentation et des loyers, a augmenté de 3,6 pour cent le mois dernier par rapport à l’année précédente, pour atteindre le niveau le plus élevé depuis 1991. Les produits de première nécessité, qui représentent une grande partie des dépenses des travailleurs, augmentent plus rapidement. La viande, la volaille, le poisson et les œufs ont augmenté de 5,9 pour cent par rapport à l’année dernière et de 15,7 pour cent depuis août 2019.

Les prix des carburants et de l’électricité s’envolent à l’échelle mondiale, car la production de charbon, qui génère 40 pour cent de l’électricité mondiale, reste inférieure de 5 pour cent aux niveaux d’avant la pandémie et les lignes d’approvisionnement sont en crise. Les gouvernements alliés au sein de l’OPEP refusent d’augmenter la production de pétrole brut, ce qui maintient son prix à son niveau le plus élevé depuis sept ans.

De nombreux membres de la classe moyenne méritocratique des États-Unis se moquent de ce que les travailleurs et les agriculteurs doivent affronter et considèrent l’inflation comme positive. « Voir monter la pression sur les prix », affirme Blerina Uruci, économiste principale chez Barclays, « c’est du progrès. »

Peur croissante de la classe ouvrière

Ceux de la couche sociale dont Blerina Uruci fait partie se retrouvent partout dans les agences gouvernementales, les organisations « à but non lucratif » et les universités. Ils sont convaincus que leur scolarité et leur « brillance » les préparent à réguler la vie des travailleurs, sur lesquels on ne peut compter pour savoir ce qui est dans leur propre intérêt. Ils débitent des « théories », dont s’empiffre la presse libérale, pour expliquer pourquoi les travailleurs sont « déplorables » et pourquoi il faut les considérer comme dangereux.

Leur haine des travailleurs ressort clairement dans l’article, publié le 7 octobre, « Ce qui a tué la lutte des cols bleus pour la justice sociale » par Farah Stockman, membre du comité de rédaction du New York Times. « L’expérience américaine se dégrade », craint-elle, à cause de l’attitude des travailleurs, qui pourraient réélire Donald Trump en 2024. Les travailleurs qu’elle a rencontrés, dit-elle, ont perdu leur emploi dans une usine de roulements à billes à Indianapolis et ont fini par se retrouver avec des emplois moins bien payés. Ils sont immuablement anti-immigrés. Ils sont un « mélange toxique d’espoir, de rage et de désespoir ».

Ces couches méritocratiques et la classe dirigeante qu’elles défendent craignent de plus en plus la classe ouvrière.

Mais comme le montrent les grèves d’aujourd’hui, loin de ne pas pouvoir nous unir pour mieux nous défendre, nous, les travailleurs, découvrons ce que nous valons, en luttant côte à côte. En construisant des syndicats, nous trouvons des moyens pour surmonter les divisions que les patrons utilisent continuellement pour essayer d’affaiblir notre classe.