Alors que le prix des produits de première nécessité augmente, les travailleurs ont besoin de syndicats pour riposter

Brian Williams
le 15 novembre 2021
Food prices have soared. Government doesn’t count ‘volatile’ figures in official inflation rate.
DÉPARTEMENT DU TRAVAIL DES ÉTATS-UNISHausse fulgurante des prix de la nourriture. En mesurant le taux officiel d’inflation, le gouvernement ne tient pas compte des prix « volatils », comme ceux de la nourriture.

La hausse des prix de la nourriture, de l’énergie, du loyer et d’autres produits de première nécessité bouleverse la vie de millions de travailleurs. Les économistes du gouvernement, qui prétendent que ses hausses sont temporaires, convainquent de moins en moins de gens.

Le gouvernement aide les patrons en faisant en sorte que l’inflation paraisse plus basse et moins dommageable qu’elle ne l’est vraiment. Par exemple, la Réserve fédérale utilise fréquemment « l’inflation de base », qui exclut les coûts de la nourriture et de l’énergie, affirmant que ces articles sont trop « volatils ». Mais ces éléments, ainsi que les factures de logement et de services publics, représentent en fait une part énorme des dépenses des travailleurs.

Les prix de la viande, de la volaille, du poisson et des œufs sont en hausse de 44 pour cent dans les supermarchés depuis septembre 2019. L’« indicateur du petit déjeuner » du Financial Times, basé sur les prix futurs des marchés mondiaux du café, du lait, du sucre, du blé, de l’avoine et du jus d’orange, a explosé de 63 pour cent au cours des deux dernières années. Les prix de l’avoine ont doublé cette année seulement.

Les prix de l’essence ont augmenté de près de 60 pour cent par rapport à l’an passé. Les travailleurs qui ont des maisons chauffées au gaz naturel, soit près de la moitié, pourraient voir leur facture augmenter de 30 pour cent cet hiver, selon l’Administration fédérale de l’information sur l’énergie.

Aujourd’hui, davantage de travailleurs utilisent les syndicats pour lutter contre les attaques des patrons et empêcher des chutes des salaires réels. Ils réclament des contrats qui incluent de sérieuses augmentations de salaire et des clauses d’indexation des salaires au coût de la vie, montrant ainsi la voie à suivre pour tous les travailleurs.

« Voilà deux ans que je gagne 15 $ de l’heure, mais maintenant les prix sont beaucoup plus élevés », a dit au Militant Inmaculada Vargas, une aide-soignante à domicile, dans son appartement du quartier de Harlem à New York le 29 octobre. « Quand je vais au supermarché, je n’achète que l’essentiel » pour sa famille de quatre enfants. Mais ce sont ces articles qui augmentent le plus rapidement.

Bénéfices records des compagnies pétrolières

Avec l’augmentation des prix du pétrole et du gaz, ExxonMobil et Chevron ont atteint leurs plus hauts bénéfices depuis plusieurs années, au cours du troisième trimestre. Ils n’utilisent pas ces profits pour augmenter la production, mais pour accroître leurs attaques contre les travailleurs. Depuis le 1er mai, les patrons d’ExxonMobil ont lockouté les travailleurs de la raffinerie de Beaumont, au Texas, alors qu’ils cherchent à casser le syndicat, le syndicat des Métallos, et qu’ils font pression pour supprimer des emplois et nuire à la sécurité des travailleurs. Une victoire de l’entreprise menacerait sérieusement tous les travailleurs du pétrole.

« La nourriture est chère et quand on a utilisé les coupons d’alimentation, ils sont utilisés », a indiqué Tynicole Lewis, un employé d’épicerie qui vit dans le Lower East Side de Manhattan, au New York Times le 27 octobre. Il gagne 12 000 $ par an et dépend de ces timbres pour aider à nourrir sa fille diabétique, Lanese. Mais maintenant ses timbres s’épuisent bien avant la fin du mois, a-t-il confié.

Comme beaucoup d’autres travailleurs, Dominic Kapustka, technicien au contrôle de la qualité à Aurora, au Colorado, essaie de compenser la hausse des prix des denrées alimentaires en travaillant plus d’heures supplémentaires, 65 heures par semaine au lieu de 55. « Il semble que peu importe ce que je mets dans le panier, les coûts augmentent », a-t-il déclaré au Times.

La hausse des prix des denrées alimentaires au supermarché ne signifie pas que les agriculteurs se portent mieux. En fait, leurs coûts montent aussi en flèche. Le prix des engrais a plus que doublé l’année dernière et les coûts du carburant et du transport augmentent également.

De plus en plus de travailleurs font la queue pour obtenir de l’aide auprès des banques alimentaires, mais un certain nombre d’entre elles ont moins de nourriture disponible maintenant, en particulier dans le cas d’articles clés comme le bœuf. Même les magasins à un dollar, où s’approvisionnent de nombreux travailleurs, augmentent leurs prix. Dollar Tree vend les articles jusqu’à 5 $ dans certains de ses magasins.

De plus en plus, les médias capitalistes décrivent ce qui se passe aujourd’hui comme de la stagflation : une combinaison d’une stagnation de la production et d’une augmentation des prix. De telles conditions ont ravagé le niveau de vie des travailleurs dans les années 1970.

Le produit intérieur brut des États-Unis a brutalement chuté à un taux de croissance annuel de 2 pour cent de juillet à septembre de cette année, en baisse par rapport aux 6,7 pour cent du trimestre précédent. En même temps, l’indice des prix à la consommation a augmenté de 5,4 pour cent en septembre, la plus forte hausse en 14 ans. Et il a augmenté à un rythme similaire au cours des trois mois précédents. Cela représente une réduction de salaire de 2 pour cent pour le travailleur moyen en juillet, a rapporté CNBC.

« Le danger d’explosions inflationnistes soudaines s’inscrit directement dans les conditions de dépression déflationnistes », a écrit Jack Barnes, secrétaire national du Parti socialiste des travailleurs dans Nouvelle Internationale No 5. Face à l’effondrement des taux de profit et à la montée de la résistance de la classe ouvrière, « certains gouvernements capitalistes seront pris de panique et vont essayer d’amortir les coups en imprimant simplement plus d’argent.

« Quand cela se produira, les travailleurs et les agriculteurs feront face au pire scénario possible : un haut niveau de chômage combiné à une inflation explosive. Les travailleurs qui ont un emploi verront leurs salaires réels s’effondrer ; les travailleurs qui vivent de leurs pensions seront ruinés ; et les agriculteurs seront à nouveau frappés par une vague de saisies », a expliqué Jack Barnes.

Les gouvernements capitalistes ont imprimé de l’argent et augmenté les dettes publiques à des niveaux inimaginables : 28,9 billions de dollars aux États-Unis au 29 octobre.

« Les banques centrales des États-Unis, du Japon et de l’Europe ont augmenté leur bilan cumulé de plus de 10 billions de dollars depuis le début de la pandémie », rapporte Bloomberg News. Comme cette masse monétaire dépasse de loin la production de marchandises à acheter, les prix montent. Cette situation est exacerbée par un embouteillage de marchandises sur des dizaines de navires porte-conteneurs qui attendent d’être déchargés dans les ports du pays.

Au lieu d’utiliser ces énormes sommes d’argent pour investir dans la modernisation des installations de fabrication et créer de nouveaux emplois ou accroître la production pour fabriquer ce dont les travailleurs ont besoin, la classe capitaliste trouve qu’il est plus rentable aujourd’hui de spéculer sur des capitaux fictifs comme des actions et des obligations ou sur des paris sur des bitcoins et autres crypto-monnaies.

Dans les années 1970, les ajustements du coût de la vie pour suivre la hausse de l’inflation étaient un point commun à toutes les conventions syndicales. En 1976, plus de 60 pour cent des travailleurs syndiqués américains étaient couverts par des conventions collectives avec des clauses d’ajustement au coût de la vie. En 1995, cette proportion n’était plus que de 22 pour cent. Les patrons ont ciblé et éliminé ces clauses d’ajustement au coût de la vie de nombreux contrats et nos syndicats se sont affaiblis.

Les grèves menées par les travailleurs de John Deere et de Kellogg’s, les mineurs de charbon à Warrior Met en Alabama et d’autres luttes ouvrières montrent la voie pour renforcer nos syndicats. Ce faisant, les travailleurs doivent lutter pour des ajustements au coût de la vie dans tous les contrats et pour toutes les pensions et prestations sociales.