Que signifient les résultats des élections de 2021 pour la classe ouvrière américaine ?

Terry Evans
le 22 novembre 2021
Doug Nelson, candidat du SWP à la mairie de Minneapolis, à droite, lors d’un rassemblement contre l’embargo américain sur Cuba le 15 juillet. Les candidats du SWP ont construit la solidarité avec les luttes syndicales et ont décrit la voie à suivre pour la classe ouvrière
MILITANT/MARY MARTINDoug Nelson, candidat du SWP à la mairie de Minneapolis, à droite, lors d’un rassemblement contre l’embargo américain sur Cuba le 15 juillet. Les candidats du SWP ont construit la solidarité avec les luttes syndicales et ont décrit la voie à suivre pour la classe ouvrière

Les élections de 2021 ont marqué un net rejet de la politique antiouvrière de l’aile socialiste libérale et bourgeoise du Parti démocrate par les travailleurs et les agriculteurs de tout le pays. Lors de référendums « définancez la police » à Minneapolis et à Seattle ou d’élections dans tout le pays, les candidats associés à ces points de vue ont subi la défaite, entraînant d’autres démocrates avec eux.

Ces résultats ont montré que des millions de travailleurs s’opposent fermement aux politiques visant à nous imposer des contrôles sur notre façon de penser, de parler et de nous comporter.

C’est ce qui ressort d’un avertissement sévère adressé aux dirigeants du Parti démocrate par James Carville, un conseiller politique de longue date du parti. « Ce qui a mal tourné, c’est simplement la stupide culture woke, a-t-il soutenu à l’émission PBS NewsHour. Ne regardez pas seulement la Virginie et le New Jersey. Voyez ce qui s’est passé à Long Island, Buffalo, Minneapolis et même Seattle.

« Ce que je veux dire, c’est que cette folie de « définancer » la police, cette idée d’enlever des écoles le nom Abraham Lincoln.

« Ils utilisent un langage que les gens n’emploient tout simplement pas. Cela provoque une réaction négative et de la frustration. »

Face au recours croissant à des « décrets » gouvernementaux par des libéraux convaincus que les travailleurs sont trop stupides pour savoir ce qui est bon pour eux ou contre l’imposition par des responsables de commissions scolaires de la « théorie critique de la race » y compris dans les cours de mathématiques, de nombreux travailleurs ont exprimé leur colère dans l’arène déformée des élections capitalistes.

L’intérêt croissant pour les campagnes et les activités du Parti socialiste des travailleurs reflète le rejet par les travailleurs des démocrates qui qualifient notre classe de « déplorable ». Joanne Kuniansky, la candidate du parti au poste de gouverneure du New Jersey, a été créditée de plus de 3 800 voix à ce jour.

Le référendum « définancez la police » est rejeté

À Minneapolis, ceux qui se disent « abolitionnistes » ont parrainé un référendum visant à « définancer » la police et à la remplacer par un « département de la sécurité publique » composé en grande partie de travailleurs sociaux dont « la démarche globale envers la criminalité est basée sur la santé publique ». On garderait quelques policiers qu’on n’utiliserait que « si nécessaire ». Cette proposition a été nettement rejetée.

« Parce que les travailleurs doivent faire face quotidiennement aux conséquences et aux contradictions du monde réel, ils ne peuvent pas se permettre d’agir comme s’ils vivaient dans un fantasme « woke », a expliqué aux travailleurs pendant des mois Doug Nelson, le candidat à la mairie de Minneapolis soutenu par le SWP. « Les dirigeants capitalistes définissent ce qui est un crime de façon à maintenir leur pouvoir et leurs privilèges. Leurs lois et la manière dont elles sont appliquées sont conçues pour maintenir les travailleurs dociles et pour stigmatiser comme des criminels des couches importantes d’entre nous, en particulier ceux qui sont Noirs ou issus d’autres nationalités opprimées. »

Beaucoup ont découvert cette réalité en 2020, lorsque des policiers de Minneapolis ont tué George Floyd et des manifestations nationales ont éclaté dans les villes grandes et petites du pays contre la brutalité policière.

« Ce qui préoccupe beaucoup les travailleurs, cependant, c’est la violence antisociale au sein des communautés de la classe ouvrière. Outre les conséquences immédiates pour les personnes touchées, elle sape la confiance des travailleurs et mine la solidarité sociale, a expliqué Doug Nelson. Les policiers et les tribunaux des dirigeants sont dirigés contre nous, mais il vaut mieux vivre sous l’autorité de leur règle de droit que sans elle et avec des seigneurs de la guerre, des gangs et des justiciers qui comblent le vide.

« Puisque la police existe pour protéger le système axé sur le profit, qui engendre le crime, aucune « politique pour contrôler la police » ne représente une solution, a-t-il dit. Les communistes sont pour démanteler la police capitaliste, mais seulement lorsque les travailleurs auront pris le pouvoir politique et forgé des combattants expérimentés avec une conscience de classe pour les remplacer. »

Dans la ville libérale de Seattle, les candidats « abolitionnistes » aux postes de maire et de procureur de la ville ont été battus.

Les démocrates perdent en Virginie

La défaite de l’ancien gouverneur démocrate, Terry McAuliffe, en Virginie, face à un adversaire pratiquement inconnu, Glenn Youngkin, a été un choc pour les commentateurs libéraux.

Terry McAuliffe a subi la défaite après avoir reproché aux parents de « dire aux écoles ce qu’elles doivent enseigner ». Cette remarque faisait suite à un débat sur les mesures prises par les conseils scolaires libéraux pour intégrer la « théorie critique de la race » dans les programmes scolaires à tous les niveaux. Selon cette théorie, les caucasiens sont racistes de naissance. Elle rend les travailleurs responsables de l’oppression raciste, alors que ce sont les dirigeants capitalistes qui l’entretiennent et l’utilisent pour perpétuer leur emprise sur le pouvoir.

Terry McAuliffe a attaqué les parents après que Scott Smith a été arrêté, lors d’une réunion du conseil scolaire du comté de Loudoun le 22 juin. Scott Smith avait réprimandé les responsables scolaires, en affirmant que ceux-ci n’avaient rien fait lorsqu’un garçon qui s’identifiait comme une femme a violé sa fille dans les toilettes pour femmes de l’école. Le comté de Loudoun permet aux élèves d’utiliser les toilettes qui correspondent selon eux à leur identité de genre, C’est la Maison-Blanche de Barack Obama qui a lancé cette politique au niveau fédéral. Elle fait partie d’une attaque plus large contre les droits des femmes.

Après l’arrestation de Scott Smith, l’administration de Joseph Biden a collaboré avec l’Association nationale des commissions scolaires pour publier une lettre alléguant que les membres de leur conseil d’administration font face désormais à des menaces croissantes de « terrorisme domestique ». Il a cité la colère de Smith à titre d’exemple. Le procureur général Merrick Garland a déchaîné le FBI pour traquer les auteurs de cette « menace ».

Au cours de la semaine qui a précédé les élections, l’ancien président Obama a fait campagne pour le démocrate Terry McAuliffe, appuyant sa défense des commissions scolaires et traitant les plaintes des parents d’« indignation factice ». Le 25 octobre, un juge du tribunal de la famille a déclaré coupable le garçon accusé du viol de la fille de Scott Smith dans les toilettes.

Quelques jours plus tard, McAuliffe a été défait.

Au New Jersey, le démocrate libéral sortant Philip Murphy été réélu par une faible majorité et Steven Sweeney, le président démocrate de longue date du Sénat de l’État, a été évincé par Edward Durr, candidat républicain pour la première fois. Les libéraux se sont moqués du gagnant, un camionneur dont le budget total de campagne était inférieur à 10 000 $. Ils ne pouvaient pas croire qu’un travailleur puisse se présenter et gagner.

Mais avec son téléphone portable, il a lancé des publicités qui ont trouvé un écho auprès des travailleurs dont les membres de la famille et des voisins avaient fait les frais de la politique des démocrates. Dans l’une d’entre elles, il disait qu’il se présentait parce que « Murphy a forcé les résidences pour personnes âgées à accueillir des patients atteints de la COVID-19, entraînant la mort de plus de 8 000 de nos aînés » pendant la pandémie.

De telles politiques découlent du mépris des dirigeants pour les travailleurs. Ils craignent que nous soyons plus nombreux à reconnaître que les patrons et leurs partis n’ont pas d’autre « solution » à la crise capitaliste que de la décharger sur notre dos.

D’autres campagnes à travers le pays ont reflété ces tendances. À Buffalo, dans l’État de New York, le maire sortant Byron Brown a perdu la primaire démocrate de cet été face à India Walton, qui est soutenue par l’aile socialiste des démocrates. Brown a cherché à ignorer la campagne que celle-ci menait et il a refusé de débattre avec elle. Ensuite, il a mené contre Walton une sérieuse campagne en demandant aux électeurs d’inscrire chacun son nom sur le bulletin de vote au moment de voter. Il a finalement gagné l’élection, même si son nom n’apparaissait pas sur le bulletin de vote.

Les commentateurs libéraux ont répondu aux défaites des démocrates en dénigrant les travailleurs. Les électeurs sont « maussades », ont dit les rédacteurs du New York Times en maugréant. Le chroniqueur Charles Blow a exprimé l’opinion que Glenn Youngkin avait gagné parce qu’il avait suscité « l’anxiété raciale blanche » si commune chez les travailleurs.

La socialiste démocrate Alexandria Ocasio-Cortez a approfondi le cours antiouvrier de son aile du parti. Irritée par les critiques de James Carville, elle a fait valoir que Terry McAuliffe avait perdu en Virginie non pas parce que ses positions étaient en conflit avec celles des travailleurs, mais parce qu’il n’était pas assez radical.

Elle a affirmé que les seules personnes qui utilisaient le mot « woke » étaient des « personnes âgées », comme « Carville et les experts de Fox News ».

Les libéraux veulent consolider leur pouvoir

Les démocrates de New York ont utilisé leurs majorités au Sénat et à la Chambre de l’État pour inscrire trois questions référendaires sur le bulletin de vote au nom de l’élargissement des « droits de vote ». En fait, ils ne cherchaient rien d’autre que de permettre aux démocrates de se maintenir plus facilement au pouvoir.

Les mesures, dont certaines que l’ex-gouverneur Andrew Cuomo avaient déjà décrétées pendant la pandémie, ont été proposées comme amendements à la constitution de l’État pour qu’il soit plus difficile de les annuler à l’avenir. La première était une mesure de redécoupage. Cette mesure modifierait la loi pour permettre au gouvernement de l’État de procéder à un redécoupage avec un vote de 60 pour cent, contre 66 pour cent dans la loi actuelle. Ce coup de force signifierait qu’avec leur majorité les démocrates pourraient redessiner les circonscriptions électorales chaque fois qu’ils le jugeraient avantageux.

Une autre mesure permettrait à tous les électeurs de voter par procuration, qu’ils soient absents ou non. La troisième permettrait de s’inscrire pour le vote jusqu’au jour de l’élection. Toutes ces mesures ont comme objectif d’essayer de maintenir le contrôle par le Parti démocrate.

C’est un mouvement de masse dirigé par les Noirs qui a gagné le droit de vote dans les années 1960 et renversé le système de ségrégation de Jim Crow. C’est alors qu’ont été interdits les taxes spéciales d’élection, les « tests de lecture et d’écriture » biaisés et d’autres mesures utilisées pour refuser aux Noirs le droit de vote. Mais les mesures promues par les démocrates à New York n’avaient rien à voir avec cela.

Les trois mesures ont été rejetées.

Les attaques les plus graves contre le droit de vote à New York sont venues des démocrates. En 2020, ils ont utilisé leurs majorités à Albany pour abaisser le nombre de signatures exigées pour se présenter aux élections dans le cas des partis des patrons « majeurs » tout en le triplant pour des partis comme le Parti socialiste des travailleurs.

Ils attaquent les républicains et essaient de les affaiblir, mais ce qu’ils craignent surtout, c’est que la classe ouvrière rompe avec les deux partis des dirigeants et avec leurs tours de passe-passe et qu’elle entre en politique en son propre nom, avec son propre parti, un parti des travailleurs, pour lutter pour le pouvoir. Lors des élections cette année, les candidats du SWP ont trouvé un intérêt plus large pour ce cours.